La revue RH&M - N°79 - Octobre 2020 - 9

je ne connaissais pas le pétrole, je ne
connaissais pas vraiment la France. Ce
sont mes expériences passées, couplés à
mon parcours interne, qui m'ont permis
de connaître les métiers techniques de
l'exploration-production et m'ont aidé
à m'intégrer. Pour une femme étrangère, qui n'est pas ingénieure, il faut
une certaine légitimité pour être accepté
dans cette famille. Sans cette capacité à
s'adapter et la connaissance du terrain,
c'est difficile d'avoir cette légitimité. Et
je pense que ma formation juridique,
notamment aux États-Unis pendant près
de 10 ans, me permet de penser de façon
structurée et objective, ce qui est importante dans une entreprise d'ingénieurs.
Alors que vous expliquiez au tout
début que l'image de Total en
France n'est pas reluisante, qu'elle
est votre secret pour attirer les
hauts potentiels ?
Les étudiants des meilleures écoles de
France, en particulier les ingénieurs, ont
toujours su que Total présente des défis
technologiques attractifs, sur lesquels ils
veulent travailler. Les questions climatiques font partie de ces défis et mon travail consiste à les inviter à y contribuer.
Il faut aussi montrer que Total n'est pas
un monolithe, que c'est un Groupe multi-énergies, où les gens travaillent avec
un véritable esprit d'équipe et beaucoup
d'innovation dans un contexte convivial.
En termes de culture, diriez-vous
que Total est un groupe français

implanté à l'étranger ou
un véritable groupe global ?
Je pense que c'est un véritable groupe
global avec une identité française.
Vous savez, Chevron ou Exxon, sont
des groupes globaux, avec une identité
américaine.
Pouvez-vous évoquer une action
ou un projet que vous avez
mené directement avec Patrick
Pouyanné et qui a bien entendu
réussi et dont vous êtes fière ?
De toute évidence, le projet Better
Together, dont j'ai parlé plus tôt dans
cette interview. Nous avons lancé le projet en mars 2019. Les résultats de Total
Survey, notre enquête interne qui interroge plus que 80,000 collaborateurs
dans le monde, réalisé en novembre
2019, prouvent que nos collaborateurs
et nos managers s'identifient au projet.
Les verbatims montrent le projet est
une vraie réponse à leurs souhaits. On
voit déjà que ça bouge. Dans les comportements des managers, on a gagné
deux, trois points sur des sujets comme
« est-ce que vous recevez un bon feedback de votre manager ? », qui était un
point très faible pour nous, « est-ce que
les EIA vous apportent vraiment quelque
chose ? », « est-ce que vous êtes impliqué dans la construction de stratégie de
votre équipe ? ». Mais nos collaborateurs
et nos managers disent aussi « vous avez
créé des attentes par ce projet ambitieux! ».
Il va donc falloir que l'on délivre, mais
nous savons que les équipes sont avec
nous, ce qui est rassurant. Construire
ensemble cette ambition est le projet
dont je suis le plus fière.
En matière de digitalisation
et d'intelligence artificielle, où
en est le Groupe Total avec quelle
incidence sur la stratégie
de l'entreprise ?
Nous venons d'annoncer la création
d'une digital factory pour Total. Elle
regroupera 300 personnes, basées au
cœur de Paris et va accompagner tout
le Groupe dans les projets digitaux liés
avec nos besoins, aux opérations, avec
tout le travail que les salariés sont en
train de faire. Ce sera aux business de

venir avec des idées. On va envoyer, au
sein de cette digital factory, les gens qui
viennent des branches traditionnelles
et moins traditionnelles, pour réfléchir avec de jeunes professionnels du
numérique qui aideront non seulement
à développer des outils mais aussi à penser et à travailler différemment. Il y a un
double enjeu : la digitalisation dans le
sens efficacité mais aussi comment on
change le mindset dans le Groupe.
La nouvelle finalité de l'entreprise,
au-delà de générer des profits
pour l'actionnaire, est d'élaborer
une raison d'être dont le bien
commun est un nouveau socle du
futur de l'entreprise. La question
est, où en est-on chez Total en
la matière ?
Nous avons raisonné autour d'un projet d'entreprise global, One Total, pour
lequel nous avons lancé une démarche
participative impliquant les collaborateurs du groupe à chaque étape de
sa construction : en 2015, des ateliers
regroupant plus de 5000 contributions
pour exprimer l'ambition business du
Groupe : devenir la major de l'énergie
responsable dont la mission est d'apporter au plus grand nombre une énergie abordable, disponible et propre. En
2016, en mobilisant plus de 1600 managers pour la définition de nos valeurs
et, enfin, en 2017 et 2018, pour définir
le pilier humain de projet d'entreprise
,« Better Together » dont je parlais plus
haut, une démarche en 2 temps, très
large, avec plus de 12000 participants
au niveau mondial.
Nous avons aussi revu notre stratégie
autour de la recherche d'une meilleure
valeur ajoutée pour la Fondation Total
et réaffirmé notre responsabilité sociale
et sociétale dans notre code de conduite.
C'est donc collectivement que, via notre
ambition, nos valeurs, notre code de
conduite et la stratégie de notre fondation, nous avons répondu à la question :
qu'est-ce qu'on fait et pourquoi est-ce
qu'on le fait ? Pour faire vivre l'ambition « One Total », et tenir en compte
des évolutions à venir, nous allons continuer à nous appuyer sur ces démarches
participatives avec les collaborateurs.

LA REVUE RH&M N°79 | OCTOBRE 2020 | P.9

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