SIGMAG - N°29 - Juin 2021 - 27

DOSSIER
ressources de manière à localiser
à travers l'Europe tout gisement
métallique et non métallique, connu
ou supposé. Pour la première fois
étaient donc bâties des bases de
données dans lesquelles tous
les pays engagés décrivaient les
gisements de la même manière,
avec des descripteurs identiques
et des vocabulaires semblables.
Coordonné pa r
l e cent re de
recherche géologique de Finlande,
ce programme a permis de fédérer
l'expertise de plusieurs services
de géologie nationaux, dont le
BRGM, mais aussi d'industriels
européens. Si Promine avait le
mérite de décrire les gisements
au travers d'une quarantaine
de caractéristiques comme les
coordonnées géographiques,
les descr ipt ions géologiques
o u e n c o r e l es r es so u rc es
bibliographiques, il avait toutefois
l'inconvénient de présenter une
base de données relativement figée.
LA SOUVERAINETÉ DE
L'INDUSTRIE EUROPÉENNE
Ainsi, le BRGM avait élaboré sa base
de données sur les ressources avec
le référencement de quelque 15.000
gisements à travers tous les pays de
l'Union ; un travail statique matérialisé
par la visualisation de points sur
une carte. Cette expérience basique
aura permis le rayonnement du
projet au-delà du cercle restreint
d'experts en ressources minérales.
Dans un même souci de vulgarisation,
la version 2 du projet Promine
baptisé Minerals 4 EU a abouti sur
des modèles plus dynamiques, en
créant par exemple des web services
pouvant être « moissonnés ».
Les outils cartographiques ont ainsi
permis une prise de conscience
des enjeux liés aux approvisionnements
en matières premières
minérales plus largement que
le strict cadre de la ressource.
Dans le contexte de l'ac tuelle
crise économique et sanitaire,
la souveraineté de l' industrie
européenne a été questionnée
face à de nombreuses productions
délocalisées en Chine et dans
les pays d'Asie du Sud-Est. La
ressource minérale n'échappe pas à
une analyse fine sur la dépendance
envers des pays tiers. Mieux la
connaître et mieux l'exploiter est
donc un défi géopolitique
FRAME : L'EUROPE À L'AFFÛT
DES SUBSTANCES MINÉRALES
Les programmes
Promine ou Frame
permettent de
localiser en Europe
les gisements
des ressources
indispensables à
l'industrie, comme
le lithium ou la
silice.
Le BRGM coordonne au niveau européen un projet dont il cofinance les
recherches avec la Commission européenne. Fédérant les services
géologiques européens, coordonné par l'organisme EuroGeoSurveys,
le programme « Frame » s'est fixé pour objectif de produire des cartes
prédictives pour différentes substances minérales que sont le cobalt, le
lithium, le graphite naturel, les terres rares ou encore les nitrates. Initié
en 2019, il se conclura cette année et permettra à terme de produire des
cartes sur la distribution géographique de la favorabilité de découverte
d'un gisement. Pour l'heure, les supports cartographiques ne font que
confirmer certaines informations connues des géologues.
Par exemple, les recherches de lithium dans la chaîne hercynienne
(couche géologique traversant une grande partie de l'Europe) n'ont
fait que valider la présence du métal alcalin. Néanmoins, elles ont mis
en évidence des zones géographiques où des gisements n'étaient pas
suspectés, comme en Calabre ou en Corse.
« Faire émerger de la connaissance à partir du croisement de données
déjà existantes est la vraie plus-value de ces recherches, note Bertrand
Guillaume, ingénieur de recherches au BRGM. En identifiant des
gisements répertoriés, nous révélons des zones géographiques où
ces substances n'ont pas encore été découvertes. Cela nous permet
de lancer des investigations plus poussées. C'est un pari, car dans la
prospection des ressources minérales, la phase d'exploration est longue
et coûteuse. La cartographie prédictive permet de cibler les zones les
plus favorables. Réduire la surface à explorer permet d'aller plus vite en
minimisant les coûts ».
Si des outils de modélisation 3D des gisements permettent de définir les
teneurs des minerais dans le sous-sol, le BRGM travaille déjà aux outils
de demain. Bertrand Guillaume pense à une cartographie qui permettrait
d'intégrer des facteurs économiques ou environnementaux en partant
de critères géologiques. Dans un proche avenir, la connaissance de la
géologie pourrait ainsi être corrélée avec des données sur les espaces
protégés afin de définir un pourcentage de territoire inaccessible à
l'extraction. Et ainsi mieux protéger l'environnement.
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