SIGMAG - N°35 - Décembre 2022 - 18

ENQUÊTE
en vert, la mer et les océans
en bleu... Pour Clara Dealberto,
« ce qui prime, c'est l'ef ficacité
de la représentation ; le but étant
de mettre en avant l'information
au moyen de la couleur ». Des
flèches peuvent être ajoutées pour
faciliter et orienter la lecture de la
carte. Le cartographe peut jouer
sur les épaisseurs, les courbures
et les teintes pour rendre compte
de l'amplitude ou de la puissance
de l'information. « Pour l'invasion
des forces russes en Ukraine,
certains cartographes avaient pris
le parti de la représenter au moyen
de flèches imposantes de couleur
rouge pour marquer le dynamisme
et la force », témoigne Kevin Prieur.
Plus largement, la cartographie
est un langage composé de sept
variables visuelles (forme, taille,
couleur, valeur, texture, grain,
orientation) offrant un large champ
des possibilités à ses utilisateurs
selon la cible visée. En présence de
Déficient Visuel de la Couleur (DVC)
par exemple qui confond le rouge
et le vert, il peut être opportun
d'associer des symboles aux
couleurs sur une version « print ».
Sur ce point, Le Monde avait innové
lors des résultats des dernières
élections présidentielles. « Sur
leur site, il avait ajouté un bouton
personnalisé sur lequel pouvaient
cliquer les DVC, leur permettant
de consulter la carte dans d'autres
teintes adaptées », se souvient Jules
Grandin. Dans les rédactions, les
cartographes doivent également
apprendre à composer avec la
charte graphique du média. « Aux
Échos, la couleur de la carte varie
selon sa pagination dans le chemin
de fer », illustre Jules Grandin.
Sur la toile, la rigidité est moindre.
Moins figé, ce média rend possible la
mise en ligne de cartes dynamique
qui peuvent grandement faciliter
la lecture et la compréhension de
la carte sur des sujets complexes.
« L'information peut être découpée
en di f f é rentes couches que
l'internaute peut parcourir à sa
guise. Cela peut not amment
permet tre de hiérarchiser les
données et de rendre leur lecture
moins indigeste », commente Clara
Dealberto. Mais il doit aussi faire
face à d'autres contraintes, comme
s'assurer du poids des car tes
publiées, au risque de décourager
Dans une carte de
presse, couleurs,
épaisseurs de
traits ou symboles
sont différents
paramètres
pouvant jouer sur le
visuel autant que la
symbologie.
l 'internaute en cas de lenteur
d'affichage et de le voir déserter ses
pages ; surtout s'il ne jouit pas d'une
excellente connexion ou qu'il opère
sa lecture depuis un Smartphone.
Cela peut conduire à mener des
arbitrages pour alléger le rendu
final.
Note : en raison des
droits d'auteurs,
nous n'avons pas
pu publier les
cartes parues
dans les différents
médias cités dans
cet article.
C'EST QUOI UNE BONNE CARTE ?
Tous les experts que nous avons
interrogés s'accordent sur ce point :
une carte est qualitative lorsqu'elle
remplit sa mission initiale. « Elle
doit être comprise instantanément,
presque sans avoir besoin de
consulter la légende», assure
Emmanuel Bousquet. D'où la
nécessité de bien calibrer en amont
le sujet traité. Et de ne pas être tenté
de l'outrepasser en démultipliant
les informations au moment de la
conception. « Rendre accessible la
production cartographique à tout
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à chacun est l'une des difficultés
à laquel le peut se frot ter un
géographe récemment diplômé »,
consent Kevin Prieur. En d'autres
termes, une mauvaise carte est
un support qui n'apporte aucune
information ni aucune logique
géographique ou qui déforme la
réalité. Et les meilleures cartes elles
ressemblent à quoi alors ? Pour
Jules Grandin, « ma meilleure carte,
c'est lorsque j'ai compilé tous les
départements français traversés
par Emmanuel Macron durant
son premier quinquennat. C'était
assez inédit. La plus rigolote, c'est
sans doute celle que j'ai réalisée
au moment de la campagne
présidentielle, la racontant à la
manière d'une course de bateau ; la
cartographie imaginaire venant au
secours de l'information ».
De son côté, Clara Dealber to
admet apprécier créer des cartes
esthétiques, en rapport avec le
sujet et conférant une projection
originale ; comme celle qu'elle avait
réalisée sur les utopies et autres
mondes mythiques à travers les
siècles qui revêtaient la forme d'un
papillon. Pour elle, le métier de
cartographe est comparable à celui
d'un traducteur visuel. « Il doit veiller
à respecter au mieux le fond tout en
le restituant de la meilleure manière
possible pour le lecteur ». Sortant
progressivement de l'ombre, il a,
semble-t-il, largement trouvé son
public. À l'avenir, nul ne doute qu'il
devrait le conserver, voire même
l'étoffer. La cartographie pourrait
encore s'immiscer davantage
dans les médias, et notamment
auprès du canal
télévisuel . À
suivre...
Fanny Per r in d'Ar l oz
SIGMAG - N°35 - Décembre 2022

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