Expertises des Systèmes d'information - Mai 2020 - N°457 - Le mensuel du droit de l'informatique et du multimédia - 180

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On peut donc imaginer une
application téléchargeable de
façon volontaire sur un téléphone
mobile fonctionnant avec la
norme
Bluetooth
permettant
des échanges bidirectionnels
à la distance de 1 à 1,50 m,
pour fournir des informations
strictement utiles sur le contact et
sa durée. Il faudrait d'ores et déjà
développer plusieurs applications
à expérimenter, en prenant en
compte différentes options, pour
décider et préparer l'adhésion de la
population pour un usage massif
volontaire au moment de la sortie
du confinement.

les libertés individuelles et collectives risquent d'être durablement
restreintes au nom de la santé
publique. Cette crainte est partagée
par le Comité consultatif national
d'éthique pour les sciences de
la vie et de la santé  considérant
que «ce choix individuel peut être
orienté, voire influencé, de diverses
manières, par exemple à travers les
techniques de persuasion ou de
manipulation, la pression sociale,
l'imitation des actions des proches»,
et que «l'attribution de la responsabilité à la personne plutôt qu'à la
collectivité est un sujet de préoccupation éthique».

Sur les craintes
et les conditions du recours

En France, les données personnelles relèvent de la loi Informatique
et libertés et du droit  européen,
dont le RGPD26, en s'accordant sur
la proportionnalité des atteintes
à la vie privée, le consentement,
l'anonymisation des données et
les conditions de leur sécurité. La
vigilance  relève notamment de
la Cnil27, du Défenseur des droits,
du Conseil d'Etat, etc. Un premier
avis du Conseil scientifique réuni
autour du Chef de l'Etat est attendu
sur cette question. La Cnil et le
CareE28 doivent aussi se prononcer,
tout comme le Comité consultatif
national d'éthique. Il faut savoir
jusqu'où nous sommes prêts à
aller, en soulignant que le pistage
d'une population représente une
rupture de culture vers une société
de contrôle, avec un risque de nonretour si elle en devient la norme,
comme c'est déjà le cas des données
qui sont transmises aux GAFA.

Devant la crise mondiale, tous
les pays se mobilisent. Certains
ont déjà recours aux données de
géolocalisation GPS (ex. Corée du
sud24, Taïwan25), et avant cela à la
reconnaissance faciale des habitants
et à la mesure de températures par
caméra thermique (ex. Chine). En
France, l'Etat prend conscience
des réponses que ces technologies
pourraient apporter, tandis que
l'acceptabilité sociale change en
même temps que l'évolution de
l'épidémie. Dans ce contexte, où la
population est inquiète sans voir
l'issue de la pandémie, tout ce qui
est présenté comme pouvant avoir
un intérêt vital : traitement, application numérique, etc., suscite une
large adhésion. Un sondage récent
publié le 31  mars indique que huit
Français sur dix sont favorables à
une application mobile de «contact
tracking». Malgré tout, l'instauration d'un traçage numérique fondé
sur la collecte des données personnelles à des fins de suivi est perçu
comme une menace pour certains,
considérant que la servitude, même
consentie, est aussi dictée par la
peur.
Le recours envisagé fondé sur une
technologie utilisant des données
personnelles pour endiguer la
pandémie de Covid-19 inquiète déjà
des parlementaires, des chercheurs
et des associations, pour lesquels

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Le système devrait être respectueux
des libertés et de la vie privée, ce
qui implique le consentement et
l'anonymisation des identifiants
des personnes en contact. Le
projet  européen PEPP-PT29, fait
appel à une diversité de chercheurs
et de développeurs du public et du
privé pour proposer des pistes, en
amont de toute décision politique
dans le domaine du «contact
tracing». L'objectif est de donner le
moyen aux citoyens  européens de
leur indiquer leur proximité récente
au virus, sur la base d'une approche
EXPERTISES Mai 2020

numérique fondée sur des échanges
Bluetooth respectant strictement
le cadre national et  européen de
la vie privée, conformément au
RGPD.  C'est l'Inria30 qui pilote le
groupe de travail français, supervisé
par le gouvernement.

Conclusion et
perspective
La construction sociale de la
pandémie de Covid-19 est devenue
puissante au plan mondial, et
chacun pourra en mesurer le degré
d'humanité et d'altruisme. Les héros
sont non seulement les personnels
médicaux, mais aussi ces gens plus
ou moins «ordinaires» démunis et
mis en première ligne pour que la
vie quotidienne de chacun ne soit
pas interrompue. Le service public
c'est cela, avec le dévouement et
l'engagement constatés. Plutôt
dépourvue malgré les déclarations
officielles, la France n'était pas prête
et a tardé à réagir. L'Homme, une
fois encore, a montré ses capacités
dans des conditions extrêmes, par
ses pratiques professionnelles et
ses attitudes, par sa culture et son
humanité, et sa capacité à adhérer
aux décisions. Quant aux technologies, elle n'interviendront qu'en
tant que support, d'une façon
temporaire et maîtrisée, sans pour
cela être la panacée.
La fin de cette crise ne sera pas
immédiate, sans un traitement
scientifiquement démontré comme
efficace, en attendant un hypothétique vaccin issu des recherches
intensives qui sont menées dans
le monde. S'il existe des attentes
sous la pression socio-économique
pour un certain déconfinement,
ceci devra néanmoins faire l'objet
d'une concertation, notamment
avec nos partenaires  européens,
et dans le respect des recommandations de l'OMS. En outre, il devra
être progressif et contrôlé sur la
base de meilleurs indicateurs que
ceux qui nous sont quotidiennement assénés, avec des chiffres
incomplets, faute de procédure
ad hoc. Suite à quatre semaines
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