Expertises des Systèmes d'information - Juillet/Août 2021 - N°470 - Le mensuel du droit de l'informatique et du multimédia - 260

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de l'OEB ou auprès des autres offices également.
L'idée est que quelqu'un du métier, du domaine
de l'invention, puisse reproduire l'invention à la
lecture de la demande de brevet ou à la lecture
du brevet. Il faut donc qu'il y ait suffisamment
d'éléments pour reproduire l'invention. De la
même manière que lorsque vous publiez un
article scientifique, il faut qu'une autre équipe
de recherche puisse vérifier que la manipulation
ou l'expérience fonctionne correctement.
Donc il faut mettre suffisamment d'informations
dans l'article pour pouvoir reproduire
l'expérience. Si on ne met pas assez d'éléments,
le brevet peut être invalidé, annulé. Il ne suffit
pas de préciser qu'on utilise du machine learning
pour prévenir tel événement par exemple.
Il faut aller plus loin et expliquer quel type de
modèle, les hyper-paramètres qu'on aurait pu
utiliser -les hyper-paramètres sont un peu les
différents boutons du modèle- et comment on
les aurait ajustés pour que
cela fonctionne, expliquer
les données qui sont
extrêmement
importantes
dans un projet de machine
learning. La majorité du
temps alloué à un projet
de machine learning est en fait consacrée aux
données et non pas à la confection du modèle
mathématique. Le modèle doit apprendre à
partir de bonnes données, c'est ce qui déterminera
en grande partie sa performance.
Les données ne relèvent pas du brevet.
Non, mais dans la demande du brevet, lorsque
l'on décrit
la manière dont on a réalisé l'invention,
il faut aussi décrire à partir de quelles
données on a entraîné le modèle. Il y a aura
plusieurs manières de le faire, mais il convient
de donner suffisamment d'informations sur la
manière de constituer le « training set », c'està-dire
l'ensemble d'entraînement ou la base de
données d'entraînement du modèle. Autrement,
on risque de rencontrer des problèmes d'insuffisance
de description. Une décision d'une
chambre de recours à l'OEB, dans le domaine
des dispositifs médicaux, porte sur un cas dans
lequel le type de données utilisées n'a pas été
bien décrit, et le brevet a été finalement été
invalidé. Le problème vient aussi d'une méconnaissance
de la technique. Si on ne la connaît pas
bien, on ne sait pas de quoi on a besoin pour la
faire fonctionner et on a l'impression qu'il suffit
juste de mettre de l'intelligence artificielle pour
que ça fonctionne. Ce qui n'est pas vrai du tout.
Notre travail est d'aller vers les inventeurs pour
leur dire quels sont les éléments manquants
importants à mettre dans la demande de brevet
pour qu'elle ne soit pas rejetée.
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La rédaction d'une demande de brevet sur
l'IA est donc assez complexe.
Oui, mais on peut retrouver la même complexité
dans le domaine de la biologie par exemple. Le
brevet dans le domaine de l'IA a ses complexités
propres. C'est surtout un champ relativement
nouveau et les décisions arrivent quelques
années après les dépôts. On ne voit donc que
maintenant les premiers effets des mauvaises
rédactions.
Dans votre clientèle, avez-vous beaucoup de
demandes de brevet en matière d'IA ?
Traditionnellement, il s'agissait surtout de
demandes liées à la vision assistée par ordinateur,
notamment dans le domaine de
l'automobile pour
les véhicules autonomes.
Désormais on a un shift très important dans
le domaine de la santé, par exemple pour les
analyses d'images, plus particulièrement pour
détecter
sur des
histopathologiques
« On peut tout à fait déposer des
brevets et faire de l'open source. »
images
des
tumeurs bénignes ou
malignes, des cellules
cancéreuses ou non, de
quel type de cancer il s'agit.
Il y a donc beaucoup d'incertitudes vu que
le domaine est nouveau et qu'il y a peu de
jurisprudence.
Il n'y a pas beaucoup d'incertitudes sur le fait que
ce soit technique parce que l'analyse d'images
est considérée comme technique. Après je dirais
que c'est une analyse de nouveauté et d'activité
inventive classique. On s'attend peut-être
à avoir une évolution dans le domaine du NLP
qui est le traitement automatique du langage,
TAL en français. Mais il est compliqué d'obtenir
des brevets dans ce domaine auprès de l'OEB.
Pourquoi est-ce compliqué ?
Parce que l'analyse sémantique n'est pas considérée
comme technique. Par exemple, analyser
des mails pour dire s'il s'agit ou non de spams
n'est pas considéré comme technique. Il y a eu
plusieurs jurisprudences à ce sujet. Et pourtant
c'est également un très gros champ d'application
de l'IA. On aimerait pouvoir dire à nos
clients que l'on peut déposer des brevets dans le
domaine du NLP.
Et cela pourrait évoluer ?
Certainement. Rappelez-vous l'époque où les
méthodes mathématiques pour faire de la cryptographie
n'étaient pas forcément considérées
comme techniques. Puis elles ont été considérées
comme telles. Ce n'est pas impossible que
cela devienne le cas pour le domaine du NLP. Je
fais partie de ceux qui pensent que cela devrait
EXPERTISES JUILLET 2021
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