i+D - Janvier/Fevrier 2018 - 46

L'extinction de la salle à manger - par Michele Keith

Avantages et inconvénients
« Les plans à aire ouverte peuvent aussi bien rehausser l'expérience des repas que lui
porter atteinte, mentionne M. Swadron. Certains obstacles, comme la tentation d'allumer
la télé pour regarder les nouvelles ou le match, peuvent totalement compromettre cette
rare occasion d'interaction sociale en personne.
Bien que Mme Myers-Fierz croie que la conception des lieux à fonction collective dans
une nouvelle construction est plus facile que celle d'autres pièces - moins de détails avec
lesquels il faut composer - elle est confrontée relativement souvent à trois enjeux
qui comportent leur lot de complications :
* l'absence de moquette engendre un « écho » - le bruit des chaussures, les appareils
électroniques, les voix.
* Lorsque le concept propose beaucoup de couleurs, il faut les planifier plus soigneusement
que dans une pièce plus petite, afin que cela fonctionne dans une grande salle qui doit se
métamorphoser, disons, de l'aire à manger à la cuisine et au séjour.
* Les inévitables meubles « libres » dans les grandes salles signifient que le dos de certains est
visible, ainsi que les éventuelles coutures disgracieuses. Par conséquent, il faut y apporter
une attention toute particulière pour s'assurer que tout paraît bien, de tous les angles.
Au sujet des grandes salles, Chris Shields révèle : « Non seulement je combine salon et salle
à manger, mais j'y intègre également la cuisine. Cela me permet de résoudre le dilemme
quant à la manière d'amalgamer les éléments traditionnellement durs de la cuisine avec ceux,
plus moelleux et confortables, de la salle de séjour. C'est une zone très passionnante
à concevoir. »
Mais rien n'est facile, ajoute-t-il. « L'idée d'offrir plus d'espace dans la grande salle est
tempérée par le désir croissant d'y mettre des meubles de plus gros calibre. Une fois que l'on
ajoute l'îlot de la cuisine dimensionné selon les activités à un canapé modulaire et une grande
table, l'espace disparaît comme par enchantement. Cela requiert une planification minutieuse
afin de parvenir à créer une grande salle fonctionnelle et confortable. D'autre part, avec les
grandes salles, les gens y gagnent beaucoup de polyvalence. Par exemple, des cloisons plus
longues offrent davantage de possibilités pour les œuvres d'art et l'expression de soi. »

Extinction, renouveau, réforme...
Sans boule de cristal, personne ne sait ce que réserve l'avenir à cette pièce de la maison.
Cependant, les designers avec lesquels nous nous sommes entretenus ne seraient pas
surpris si, un jour, les salles à manger formelles revenaient en grande pompe. C'est tout
simplement le cycle du design.

MICHELE KEITH
est une journaliste et auteure
d'ouvrages généraux new-yorkaise
qui écrit sur des sujets liés au
design. Son travail a été publié
dans The New York Times,
ASPIRE Design & Home, Luxury
Listings NYC et DESIGN.

L'on serait porté à penser que le client adepte de la grande
salle aurait tendance à faire entrer des matériaux durables dans
son aménagement. Pas tant que ça, affirme Jody Myers-Fierz.
« Les produits durables sont là depuis un bon moment, et
pourtant, on me demande rarement de les utiliser dans le design
résidentiel. C'est plus courant dans les projets commerciaux. »
« Je détiens une certification LEED, et je suggère donc certaines
options chaque fois que je le peux. À l'exception des chambres
de bébé, les gens se préoccupent généralement davantage de
l'éclairage que du caractère écologique des matériaux,
probablement parce qu'on en parle beaucoup dans les médias
et l'actualité, et que le gouvernement a fait un gros effort pour
informer le public au sujet des bienfaits de l'éclairage à DEL.
Et encore là, la somme de connaissances concernant le design
durable est bien maigre ».
Elle ajoute que c'est plus facile dans les nouvelles maisons,
où elle peut utiliser des éléments tels que des systèmes de
chauffage géothermiques qui fonctionnent bien. Car, à la longue,
ils permettent de réaliser des économies ou parfois même,
d'entraîner des avantages fiscaux qui incitent les clients à adopter
des produits écologiques.
« Nous sommes toujours conscients des types de matériaux
que nous présentons à nos clients pour chaque pièce de la
maison en ce qui a trait à leur caractère approprié du point
de vue de la durabilité et de l'entretien, souligne Wayne Swadron.
Mais, bien entendu, la réaction des clients varie de l'un à l'autre.
Bien souvent, ils commencent un projet en donnant des directives
d'"intégrer le plus de technologies vertes que possible" ce qui,
lorsque nous leur expliquons à quoi correspond ce qu'ils
demandent, se transforme en "intégrer le plus de technologies
vertes que raisonnablement possible", puis en "Oh, c'est à ça
que cela ressemble ?" ou "Est-ce vraiment ce que ça coûte ?"
Ainsi, en fin de compte, la majorité des concepts écologiques
demeurent... des concepts. »
Chris M. Shields estime que, la plupart du temps, c'est lui le
moteur des préoccupations en matière de durabilité dans un
projet donné. « J'essaie de prêcher par l'exemple, et j'espère que
cela déteint sur les gens qui utilisent mes services. Je constate
que les gens s'intéressent à l'écologie lorsque j'aborde le sujet,
et qu'ils désirent en apprendre plus. »
« Pourtant, ajoute-t-il, il continue d'y avoir beaucoup d'idées
fausses relativement à la performance des produits durables,
et celle-ci peut varier d'un fabricant à l'autre. Mais c'est ma
responsabilité, en tant que designer, de faire de mon mieux
pour que la maison que je leur laisse à la fin d'un projet soit en
meilleur état que lorsque j'y suis venu la première fois, et cela
comprend aussi son impact tant sur les personnes qui l'habitent
que sur l'environnement. »
Que peut-on faire pour améliorer les choses ? Les experts
proposent quelques idées :
* Premièrement, selon M. Swadron, « à titre de designers,
il est essentiel de bien nous renseigner au sujet de la durabilité,
puis de nous préparer à offrir aux clients des choix appropriés. »
* « Les fabricants doivent s'efforcer de mieux sensibiliser
les consommateurs, au moyen de leur publicité et leur
marketing », croit Mme Myers-Fierz.
* « L'industrie devrait suivre l'exemple du mouvement
de l'alimentation biologique, suggère M. Shields, en créant
une échelle de l'impact sur l'environnement qui soit facile
à comprendre. Cela pourrait grandement contribuer à une
prise de conscience et à cultiver le changement... un peu
de la manière dont nous effectuons nos choix une fois que
nous voyons le nombre de calories d'un repas sur un menu. »

De grandes pièces où l'on
combine cuisine et aires de
repas et de séjour peuvent
représenter tout un défi,
mais aussi offrir de grandes
possibilités. Design par
Wayne Swadron.
(Photo : Adrian Holmes)

Et qu'en est-il de
la durabilité ?

i+D - janvier-février 2018

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