i+D - Novembre/Decembre 2018 - 53

Profil ICONique : Jamie Drake - par Ambrose Clancy

i+D : On dit que simplement vivre à New York,
rend les gens plus intelligents jour après jour.
J. Drake : Je ne sais pas si je suis plus intelligent.
Mais j'apprends à coup sûr quelque chose chaque
jour. J'ai déménagé à New York après avoir obtenu
mon diplôme de l'école secondaire pour venir à
Parsons. New York est l'endroit où je voulais venir
et lorsque j'ai été admis à Parsons, j'ai cessé de
présenter des demandes dans d'autres écoles.
i+D : Que lisez-vous ces jours-ci ?
J. Drake : Je lis tous les jours le New York Times
[et] le New York Post. En version imprimée.
i+D : Vous commencez votre journée avec les
hauts et les bas.
J. Drake : Disons que j'en retire deux différents
points de vue. Et, je dois l'admettre, à cause des
distractions, parce que nos vies nous sont livrées
directement dans la paume de la main, bien
souvent, je ne termine pas la lecture des journaux
le jour de leur publication. Mais je les conserve
et je les lis.
i+D : Combien se passe-t-il de temps après
votre réveil avant que vous ne jetiez un œil à
ce tyran qui tient dans la paume de la main ?
J. Drake : Quatre-vingt-dix secondes. Je sais.
Nous en sommes vraiment captifs, n'est-ce pas ?
i+D : Existe-t-il encore des styles de design
régionaux, par exemple, Nouvelle-Angleterre,
Californie ou le Sud-Ouest ?
J. Drake : Il existe des sensibilités régionales.
Mais rien ne se limite vraiment à un endroit.
On est cependant toujours influencé par la qualité
de la lumière. Et les tissus, les textures et les
couleurs correspondent à leur région.
i+D : Vous n'utiliseriez pas des couleurs
pastel en Nouvelle-Angleterre ?
J. Drake : Peut-être. Et à Miami, je ne me sers
pas souvent de velours.

i+D : Décrivez le client infernal...
J. Drake : Celui qui refuse d'avoir foi en vous.
Qui remet tout en question, de la taille de la
portion inférieure d'une moulure située à 14 pieds
du sol, à savoir si elle devrait faire trois huitièmes
ou un quart de pouce. Et qui veut voir maquette
après maquette. Et qui discute de chaque cordon,
de chaque coussin. Vous vous demandez pourquoi
ces types de clients ont engagé un designer, au lieu
de tout faire eux-mêmes.
i+D : Qu'est-ce qui cloche avec le design,
aujourd'hui ?
J. Drake : Première réponse : il n'y a rien qui
cloche. Deuxième réponse : trop de gens se laissent
influencer par les « influenceurs » et les tendances,
au lieu de trouver ce qu'ils aiment en eux-mêmes.
i+D : Avez-vous fait l'expérience de la
révolution de l'impression 3D ?
J. Drake : Oui. Nous l'avons utilisée pour
concevoir des éléments de quincaillerie, des
robinets et des poignées de porte sur certains
projets. Je m'en émerveille.
i+D : Quel sport pratiquez-vous ?
J. Drake : Tirer sur ma cigarette électronique.
Bon, d'accord. M'entraîner trois fois par semaine
avec un entraîneur.
i+D : Qu'est-ce qui vous exalte ?
J. Drake : La créativité. Voir une chose que je n'ai
jamais vue avant.
i+D : Qu'est-ce qui vous effraie ?
J. Drake : Les grosses vagues, les chevaux qui
courent vite, les motocyclettes. Et aussi, le climat
politique dans le monde.

i+D : Certains designers ont informé leurs
clients qu'en raison des tarifs douaniers
imposés par Trump, ils ne seraient pas
en mesure d'absorber les coûts
supplémentaires, et que les prix allaient
augmenter. Avez-vous vécu cela ?
J. Drake : Pas encore, mais nous nous attendons
à voir les coûts augmenter en raison des tarifs.
J'ai une collection de meubles sous licence dont les
propriétaires sont des Chinois et les produits sont
fabriqués au Vietnam. Ils sont vendus partout dans
le monde, et en grande partie en Chine, alors je
présume qu'ils seront touchés.
i+D : Pas un bon scénario.
J. Drake : Nous vivons à l'ère de la mondialisation
et nous devons tous prospérer en tant que planète.
Les tarifs sont un désastre.
i+D : De quoi ne tenez-vous pas compte en
examinant le CV d'une personne ?
J. Drake : Je regarde tout. Chaque mot,
chaque virgule et chaque signe de ponctuation.
L'adresse. Tout.
i+D : Quel a été votre premier emploi ?
J. Drake : Chez Macy's, quand j'avais 16 ans.
J'ai travaillé au rayon des articles ménagers, aux
ventes. Mais ils ont fini par me laisser m'occuper
des étalages. J'étais assez doué.
i+D : Et qu'en avez-vous retiré ?
J. Drake : Faites ce que vous avez à faire avec
cœur et vous réussirez.
i+D : Pendant des années, vous avez dirigé
vous-même votre entreprise. Puis, il y a trois
ans, vous vous êtes associé à Caleb Anderson.
Pourquoi partager la direction ?
J. Drake : Nous étions de plus en plus occupés,
et je voulais réfléchir à la manière dont nous
pourrions continuer à croître, à servir nos clients
existants, et peut-être le faire d'une manière
qui serait moins stressante pour moi. Pour me
permettre de travailler avec un peu plus de liberté
détendue, et partager les plaisirs et le talent.
i+D : Quel trait de votre personnalité
aimeriez-vous changer ?
J. Drake : Mon impatience.
i+D : Et comment ça se passe ?
J. Drake : Je me démène.

AMBROSE CLANCY
est rédacteur en chef du Shelter Island Reporter
et romancier, auteur documentaire et
journaliste. Ses articles ont paru dans GQ,
The Washington Post et le Los Angeles Times.

Image : Danilo Agutoli

i+D : Quelle est la différence entre concevoir
une installation médicale et Gracie Mansion ?
J. Drake : Le programme compte d'abord et avant
tout. Par exemple, en acquérant une compréhension
de la manière dont les patients se serviront des
lieux, et en voulant améliorer l'expérience et en
faire profiter l'utilisateur dans les deux cas.
Les fils conducteurs sont le regard que je porte
sur les projets : un sentiment d'émerveillement,
d'équilibre et de justes proportions.

i+D : Quelle est la première chose que vous
avez conçue ou construite ?
J. Drake : Un fort, avec mon meilleur ami, Larry,
du coin de la rue, à Woodbridge. Nous avions
sept ans. C'était une fosse dans le sol, entourée
de roches provenant des murs de pierre qu'il y avait
dans notre ville. J'étais responsable de le décorer
et j'avais pillé une grange abandonnée de l'autre
côté d'une colline dans la forêt. On y avait trouvé
des lavabos rouillés et des bouteilles en verre
brisées. Je les appelais les « antiquités ».

i+D - novembre-décembre 2018

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