i + D French - September/October 2020 - 31

Les meilleurs concepts
d'établissements
correctionnels mettent
l'accent sur la confiance :
non seulement celle que
les agents des services
correctionnels accordent aux
détenus, mais aussi celle qui
se bâtit entre la collectivité
et l'établissement carcéral.

Le centre de visites du complexe de justice pour mineurs du comté de San Diego est inondé de lumière
naturelle et offre un cadre confortable et accueillant ainsi qu'un accès à des espaces verts extérieurs.
(Image : DLR Group)

Des attentes qui évoluent
Une partie du défi en matière de conception d'établissements correctionnels
consiste à aider les clients à reconnaître les possibilités qui s'offrent à eux.
Avant de concevoir le nouveau centre correctionnel du comté de Franklin
à Columbus, Ohio, les architectes de la société internationale d'architecture
HDR établie à Omaha, Nebraska, ont passé du temps, en compagnie
d'architectes de la firme DLZ, responsable du projet, et de représentants
du client, à visiter des établissements correctionnels dans tout le pays, dont
Las Colinas. Lors de son ouverture prévue au printemps 2021, ce nouveau
centre reflètera une réorientation délibérée qui s'éloigne de la notion de
confinement pour faire place aux résultats fondés sur le traitement.
« La plupart du temps, les clients ne connaissent qu'une seule prison. Ils
n'ont travaillé qu'à un seul endroit et n'ont connu qu'une seule manière de
faire les choses », explique David Bostwick, directeur de HDR, qui supervise
les projets de l'entreprise issus du système de justice. La vieille prison du
comté de Franklin, construite dans les années 1960, a souvent servi à
« véhiculer un exemple de mauvais design de prison, parfois même dans
des films d'Arnold Schwarzenegger », ajoute-t-il. Bien que les dirigeants
du comté aient demandé un établissement faisant appel à des pratiques
exemplaires, les architectes ont essuyé un refus de la part d'un des shérifs et
d'autres responsables de la prison. « Effectuer une tournée d'établissements
différents et voir comment les intervenants s'y prenaient est ce qui leur a
fait changer d'avis, explique M. Bostwick. Ils ont passé quelques journées
complètes dans les unités, à observer, à discuter avec leurs pairs, à poser
des questions. Et ils ont fini par convenir, "c'est une meilleure façon de faire
les choses" ».
Les meilleurs concepts d'établissements correctionnels mettent l'accent sur
la confiance : non seulement celle que les agents des services correctionnels
accordent aux détenus, mais aussi celle qui se bâtit entre la collectivité et
l'établissement carcéral. Bien que l'architecture consiste souvent à construire
des murs, certains projets comme le Centre de santé Rankin Inlet, dans l'anse
lointaine de Rankin Inlet, au Nunavut, Canada, nous rappellent que le défi du
design consiste également ici à faire tomber les barrières entre les citoyens.

Conçu par Parkin Architects Limited et achevé en 2013, cet
établissement à sécurité moyenne et minimale pour les personnes
qui purgent une peine ou sont en détention provisoire tire parti
des matériaux naturels courants (cellules aux murs de placoplâtre,
toilettes de céramique, grandes fenêtres avec vue panoramique)
pour éliminer tout sentiment d'un cadre institutionnalisé. Cela
repose en partie sur une sensibilité à la culture inuite, dans laquelle
l'interaction communautaire fait partie du processus de guérison.
« Les prisons sont, à mon sens, une commodité communautaire,
au même titre qu'un hôpital, une école ou une bibliothèque »,
explique Robert Boraks, directeur chez Parkin Architects. « Les
critères ne permettent pas aux détenus d'en sortir, mais cela ne
signifie pas que les membres de la collectivité ne puissent pas y
entrer. L'établissement invite la communauté à y venir. Les enfants
jouent au soccer sur les terrains et peuvent entrer pour utiliser les
toilettes. La collectivité est autorisée à profiter du gym de la prison.
Nous supprimons la stigmatisation et appuyons la réintégration.
Cette réinsertion commence par permettre aux membres de
la collectivité d'entrer dans l'établissement et de contribuer à la
guérison des détenus. »
L'architecte souligne également l'importance d'accorder à ceux-ci
de petites libertés qui bâtissent la confiance. « Cela peut être
une chose aussi simple que la possibilité d'allumer et d'éteindre
les lumières, d'entrer et de sortir avec sa propre clé, d'ouvrir une
fenêtre pour avoir un peu d'air frais, dit M. Boraks. La capacité
à contrôler son environnement favorise l'autonomisation d'une
personne. Les gens aiment avoir leur intimité, accès à l'air du
dehors et aux paysages. Cela n'est pas du tout anormal. Et l'on
ne doit pas nécessairement leur refuser ces besoins humains
simplement parce que la société a décidé d'isoler ces personnes
de la collectivité. »

i+D - septembre-octobre 2020

i + D French - September/October 2020

Table of Contents for the Digital Edition of i + D French - September/October 2020