Précis Domat - Droit administratif - 17e - 102

DROIT ADMINISTRATIF
son incompétence210
. Il en résulte également que les dispositions d'une ordonnance
ratifiée, qui portent sur le domaine réglementaire, ne peuvent être modifiées par
décret qu'après déclaration de leur caractère réglementaire par le Conseil constitutionnel,
saisi sur le fondement de l'article 37 al. 2 de la Constitution (v. infra,
nº 133).
121 Remise en cause partielle de la conception traditionnelle de la nature des
ordonnances de l'article 38 de la Constitution. - Longtemps, le Conseil constitutionnel
a fait sienne l'idée de la nature administrative des ordonnances non ratifiées,
notamment pour en déduire que ces actes n'étaient pas susceptibles de question
prioritaire de constitutionnalité, cette procédure supposant une « disposition
législative » (article 61-1 C)211
. Cependant, deux décisions des 28 mai212
2020213
, la seconde précisant la première, opèrent, sur ce point, un revirement de
jurisprudence. Selon ces décisions, en effet, dès lors que les dispositions d'une
ordonnance non ratifiée portant sur le domaine législatif ne peuvent être modifiées
que par la loi, à compter de la date d'expiration du délai de l'habilitation (article 38
C, dernier alinéa), elles doivent être regardées, dès cette date, comme des dispositions
législatives, du moins au sens de certaines dispositions de la Constitution et,
principalement, de celles de l'article 61-1. Il en résulte que leur conformité aux
droits et libertés constitutionnellement garantis ne peut être contestée que par la
voie de la question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil d'État a tiré les
conséquences de cette nouvelle jurisprudence, sans pour autant remettre en cause
fondamentalement la nature administrative de l'ordonnance non ratifiée et en évitant,
par là même, toute régression du contrôle juridictionnel exercé sur ce type
d'acte214
. Désormais, saisi, par voie d'action ou d'exception, d'une contestation
portant sur la légalité d'une disposition matériellement législative d'une ordonnance
non ratifiée, le délai d'habilitation ayant expiré, le juge administratif doit
distinguer entre les moyens qui lui sont présentés : ceux qui portent sur la conformité
aux droits et libertés constitutionnels ne peuvent être présentés et examinés
que selon la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité et doivent
donc être renvoyés au Conseil constitutionnel si les conditions du renvoi sont remplies
(sur celles-ci, v. supra, nº 69) ; tous les autres moyens (respect de la loi d'habilitation,
des principes généraux du droit, des engagements internationaux, des
■ 210. Par ex. CE, 17 mai 2002, nº 232359, M.H et a.
■ 211. Cons. const., 10 févr. 2012, nº 2011-219 QPC.
■ 212. Cons. const., 28 mai 2020, nº 2020-843 QPC, AJDA 2020.1087, D. 2020.1390, note T. Perroud,
Dr. adm. 2020, comm. 48, note G. Eveillard, JCP G 2020, étude P. Avril, P. Camby, P. Delvolvé,
R. Denoix-de-Saint-Marc, Y. Gaudemet, A.-M. Le Pourhiet, A. Levade, P. Mazeaud, J.-E. Schoettl et
P. Steinmetz, RFDA 2020, note C. Barthélémy, 1139, chron. A. Roblot-Troizier, RTD civ. 2020.596, obs.
P. Deumier.
■ 213. Cons. const., 3 juill. 2020, nº 2020-851/852 QPC, AJDA 2020.1384, Dr. adm. 2020, comm. 48,
note G. Eveillard, JCP G 2020, étude P. Avril, P. Camby, P. Delvolvé, R. Denoix-de-Saint-Marc,
Y. Gaudemet, A.-M. Le Pourhiet, A. Levade, P. Mazeaud, J.-E. Schoettl et P. Steinmetz, RFDA 2020, note
C. Barthélémy, 1139, chron. A. Roblot-Troizier, RTD civ. 596, obs. P. Deumier.
■ 214. CE, ass., 16 déc. 2020, nº 440258, Fédération CFDT Finances et autres, AJDA 2021.258, chron.
C. Malverti et C. Beaufils, Dr. adm. 2021, nº 3, comm. 12, note G. Eveillard, Gaz. Pal., 26janv. 2021,
nº 395d0, p. 32, chron. B. Seiller, JCP A 2021, nº 5, comm. 2037, note H. Pauliat, RFDA 2021.171, concl.
V. Villette.
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et 3 juillet
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