Hors collection - Liquidations de régimes matrimoniaux et de successions - 6e - 358

Liquidation de successions
La quotité disponible ordinaire est donc égale à 1/4 × 900 000 = 225 000 €.
La quotité disponible spéciale entre époux de 1/4 × 900 000 = 225 000 € en pleine
propriété et de 3/4 × 900 000 = 675 000 € en usufruit.
C. Imputation des libéralités
Il convient maintenant d'imputer, une à une et dans l'ordre chronologique, les libéralités
consenties par le défunt. En principe toutes les donations s'imputent sur la quotité
disponible ordinaire sauf les donations en avancement de part faites à un héritier réservataire
qui accepte qui s'imputent au principal sur sa réserve individuelle et pour l'excédent
sur la quotité disponible (C. civ., art. 919-1 et 919-2). En présence de libéralités consenties
en usufruit au conjoint, on retient, depuis un arrêt de la Cour de cassation rendu le
26 avril 1984, les trois règles suivantes.
1. Chaque gratifié ne peut recevoir plus que la quotité disponible (ordinaire ou spéciale)
que lui attribue la loi. C'est un principe de spécialité : à chacun sa quotité.
2. Le total des libéralités ne peut excéder la quotité disponible ordinaire, majorée de
l'usufruit de la réserve. C'est un butoir fixé par la jurisprudence174.
3. Enfin, il reste à déterminer le secteur d'imputation : la libéralité faite au conjoint
s'impute principalement sur le disponible ordinaire lorsqu'elle est faite en propriété, mais
elle s'impute sur l'excédent résultant du disponible spécial lorsqu'elle est en usufruit. Cet
excédent de la quotité spéciale par rapport à la quotité ordinaire n'est rien d'autre que
l'usufruit de la réserve175.
Le studio sis à Toulouse a été donné à Ursule, héritière réservataire qui a accepté
la succession. Cette libéralité lui a été consentie hors part successorale, de sorte qu'elle
s'impute sur la quotité disponible ordinaire. Celle- ci se ramène alors à 225 000 - 100 000
= 125 000 €.
L'immeuble de rapport situé à Paris a été donné, en nue- propriété, à Jacques, héritier
qui ne vient pas effectivement à la succession. Cette donation s'impute sur la nue- propriété
du disponible ordinaire qu'elle excède. Après pareille opération, d'une part le disponible
ordinaire est excédé de 600 000 - 125 000 = 475 000 € en nue- propriété. Elle sera réduite
d'autant. D'autre part, il reste 125 000 € en usufruit dans le disponible ordinaire et, à ce
stade, le disponible spécial entre époux est de 125 000 + 675 000 = 800 000 € en usufruit.
La donation faite à Géraldine résultant de la clause de réversion de l'usufruit est une
donation à terme de biens présents176
, le droit d'usufruit lui étant définitivement acquis dès
le jour de l'acte et son exercice s'en trouvant différé au décès du donataire (v. supra). Elle
prend donc rang au jour de l'acte. Consentie au conjoint, elle s'impute sur le disponible
spécial en usufruit ; non parce que l'option s'est notamment fixée, par hypothèse (v. supra,
détermination des héritiers réservataires et de leur droit), sur l'usufruit universel, mais parce
que cette quotité est celle qui convient le mieux à l'imputation de la libéralité consentie.
Après pareille imputation, le disponible spécial entre époux est de 800 000 - 600 000
= 200 000 € en usufruit ou, autrement dit, de 125 000 + (675 000 - 600 000) = 200 000 € en
usufruit. Le disponible ordinaire reste de 125 000 € en usufruit.
Le studio situé en bord de mer a été donné à Blandine, héritière qui ne vient pas
effectivement à la succession. La donation s'impute sur le disponible ordinaire qu'elle
excède pour la nue- propriété. Blandine en conservera donc l'usufruit mais devra subir
une réduction pour la nue- propriété. Au terme de cette imputation, le disponible ordinaire
est de 125 000 - 100 000 = 25 000 € en usufruit et le disponible spécial entre époux est de
25 000 + (200 000 - 125 000) = 100 000 € en usufruit.
174. Cass. 1re civ., 26 avr. 1984, n° 83-11839, Bull. I, n° 140, p. 117 ; Defrénois 1985, n° 33,
éd., LexisNexis, 2020, coll. Manuels,
p. 456, note G. Morin.
175. v. not. M. Grimaldi, Droit des successions, 8e
p. 268 et s.
176. Cass. ch. mixte, 8 juin 2007, n° 05-10727 : « Mais attendu que la clause qui stipule la
réserve de l'usufruit au profit des donateurs et du survivant d'entre eux, avec donation éventuelle
réciproque, s'analysant en une donation à terme de biens présents, le droit d'usufruit du
bénéficiaire lui étant définitivement acquis dès le jour de l'acte, (...) et l'exercice de ce droit
(est) différé au jour du décès du donateur (...) ».
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