Droit et Société - Tome 35 - Les impensés du droit administratif - 127

Jeanne CHAUVEL et Olivier RENAUDIE
il y a la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité 34, qui procède
à un transfert de compétences en matière de police municipale, du préfet
de police vers le maire de Paris. Contrairement à la manière dont on présente
parfois les choses, ce mouvement est loin d'être propre à Paris. Autre capitale
d'un État unitaire, Londres a connu une évolution similaire 35 avec l'adoption
de la loi du 11 novembre 1999 36. Ce que l'on peut ainsi constater à propos de
Londres et de Paris, c'est que le rang de capitale de ces deux villes ne suffit
plus à justifier un traitement juridique particulier ou encore l'inapplication de la
décentralisation territoriale. La spécificité de la capitale s'en trouve fortement
émoussée.
Non seulement la capitale ne justifie plus d'une spécificité suffisante pour
échapper à la décentralisation territoriale, mais elle apparaît engagée dans un
processus de métropolisation 37. C'est un fait que les villes, et particulièrement
les plus grandes d'entre elles, constituent désormais un objet saisi par le droit 38.
Cette reconnaissance part d'un double constat : d'un côté, la majorité de la population
française (60 %) réside dans une aire urbaine de plus de 100 000 habitants
39 ; de l'autre, les villes françaises évoluent désormais dans un contexte de
concurrence avec les autres agglomérations européennes, notamment pour attirer
les entreprises et les investisseurs. On le rappelle, les métropoles sont des
villes qui, d'une part, s'imposent comme des centres d'attraction urbaine dominants,
autour desquels gravitent des villes de moindre importance et, d'autre
part, tendent à attirer de façon croissante les activités économiques. Lorsque
l'on affirme que Paris est en proie à la métropolisation, l'on entend par là que
les pouvoirs publics l'assimilent aux autres - très - grandes villes. On peut en
prendre deux illustrations. La première illustration est la loi du 31 décembre
1982 relative au statut de Paris, Marseille et Lyon 40. Ce texte a pu être justifié
par son rapporteur à l'Assemblée nationale par la volonté des pouvoirs publics
d'adapter le statut de « ces énormes métropoles que sont nos trois plus grandes
34. Loi n° 2002-276 relative à la démocratie de proximité. Sur ce texte, vo ir no tamment Yves
JEGOUZO, « De la loi Chevènement à la loi sur la démocratie de proximité », dans AJDA, 2002,
p. 281-290.
35. Pour une comparaison de l'évolution statutaire de ces deux capitales, voir Béatrice GIBL IN,
Delphine PAPIN et Philippe SUBRA, « Paris/Londres : enjeux géopolitiques de v illes cap itales
», dans Hérodote, 101, 2001, p. 26.
36. Greater London AuthorityAct. Sur ce texte, voir Céline HISCOCK-LAGEOT, « La fin d'une
anomalie : la reconnaissance d'une autonomie de gestion pour Londres », dans RFDA, 2001 ,
p. 855.
37. Sur ce processus de métropolisation, voir notamment Christian LEFEVRE, Gouverner les m étropoles,
LGDJ, Paris, 2009 et Paul VERMEYLEN, Le temps de la métropole, L'Harmattan, Paris,
2014.
38. Sur cette question, voir Jean-Bernard AUBY, Droit de la ville. Du fonctionnement juridique
des villes au Droit à la Ville, LexisNexis, Paris, 2013.
39. Frédéric TALLET et Vincent VALLES, « La prédominance démographique des p lus grandes
communes s'atténue », dans Insee Focus, 74, 2017, p. 1.
40. Loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Par is, Mar -
seille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale.
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Recherches et travaux, vol. 35/2022

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