Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 167 - L'abus de droit fondamental - 87

Chapitre 2
LA STRUCTURE DU DISCOURS
DE LA FONDAMENTALITÉ : LA LOGIQUE
DU CONCEPT DE L'ABUS DE DROIT
FONDAMENTAL
90. Chacun voit bien aujourd'hui comment le discours juridique se recompose
autour du paradigme de la fondamentalité1, un concept qui ne lasse pas d'analyses2 et
qu'il convient à présent d'étudier. La démarche n'a évidemment pas la prétention
d'une théorie sectorielle des droits fondamentaux, encore moins celle d'une théorie
générale du droit, elle répond seulement de la nécessité à appréhender, d'un point de
vue pragmatique, le champ énonciatif du concept de l'abus de droit fondamental. Plus
tard, en effet, il sera temps de voir en quoi ce concept consiste en la contextualisation
d'un fait social litigieux au regard d'un discours formel et institutionnel : la fondamentalité.
On l'a dit, la caractérisation de la fondamentalité par la référence discursive
monopolistique est une démarche réductionniste assumée, compréhensive et explicative
du phénomène objet de cette recherche. Le concept de discours permet l'unité de
sens, il fait le lien entre les manifestations de la fondamentalité du point de vue du
langage, de la pensée et du monde. Les difficultés épistémiques ne sont pas évacuées,
mais circonscrites à l'enjeu du discours. La dimension complexe du phénomène des
droits fondamentaux nous paraît alors pouvoir être appréhendée simplement, logiquement
et méthodiquement.
91. Le concept de discours suppose un référentiel, une communauté d'interet
une matérialité. Le langage des droits est cette
matérialité du discours de la fondamentalité qui provient d'un même système de
formation4 et qui réunit autour de lui une communauté d'interprétation, laquelle interagit
selon un champ énonciatif structurellement juridique et dans un cadre référentiel
qui est majoritairement celui des sociétés pluralistes érigeant le discours des droits de
l'homme, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en fondement constitutionnel
commun. D'un point de vue ontologique, le concept de discours met en lumière la
1. X. Dupré de Boulois, Droits des libertés fondamentales, préc., p. 1.
2. S. Sydoryk, La doctrine constitutionnelle : étude de la production de la connaissance sur le droit
constitutionnel contemporainfrançais, Thèse en droit public, UT1 Capitole, 2020, pp. 300 et s.
3. « Tout énoncé se trouve ainsi spécifié : il n'y a pas d'énoncé en général, d'énoncé libre, neutre et
indépendant, mais toujours un énoncé faisant partie d'une série ou d'un ensemble jouant un rôle au milieu
des autres, s'appuyant sur eux et se distinguant d'eux » (M. Foucault, L'archéologie du savoir, préc.,
pp. 136-137).
4. Ibid., pp. 45 et s.
prétation, un champ énonciatif3

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