Doctorat & Notariat - Tome 67 - L'administration fiduciaire - 188

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L'ADMINISTRATION FIDUCIAIRE
alors même qu'il est partie au contrat au titre de sa première qualité155
. D'ailleurs,
la Cour de cassation a récemment rappelé que la signature de l'acte en deux qualités
n'implique pas une double signature156
. Même si cette décision ne concerne
pas la fiducie, tout porte à croire que la solution peut lui être étendue. Différemment,
en cas de fiducie- gestion tripartite, la problématique revêt toute son
acuité157
. Le bénéficiaire étant par hypothèse un tiers au contrat de fiducie, il peut
tarder à accepter, voire ne pas accepter du tout volontairement ou involontairement,
car non informé de la conclusion de l'opération à son profit. Il convient de
constater que la fiducie comprend dans cette hypothèse une forme de stipulation
pour autrui. De facto, il y a déjà bel et bien une entorse faite au principe de la
relativité des conventions, comme dans toute stipulation pour autrui158
, elle rend seulement ladite stipulation irrévocable160
. En la
matière, le tiers-bénéficiaire, sans être partie au contrat, acquiert dès sa conclusion
un droit direct et immédiat contre le promettant sans avoir fait connaître son
acceptation. Cette dernière n'est nullement une condition de l'existence de son
droit159
. Il est même admis
.
que des obligations puissent être mises à la charge du tiers-bénéficiaire161
316. En outre, calqué sur la stipulation pour autrui, le principe est, pour
l'heure, le suivant : le tiers-bénéficiaire doit accepter et, à défaut, il sera réputé
renonçant162
. Aussi, si l'on refuse qu'il puisse devenir propriétaire avant même son
acceptation, il suffirait d'admettre soit, la rétroactivité de son acceptation au jour
de la conclusion du contrat, soit, une modification du principe applicable. En ce
sens, s'appuyant sur un arrêt de la Cour de cassation de la première chambre civile
en date du 24 mai 2005163
, Célia Berger-Tarare a pu proposer « de consacrer
155. Dans le même sens Célia Berger-Tarare, Le fiduciaire défaillant, Regards croisés en droit
des biens et droit des obligations, préc., p. 94, n° 208.
156. Cass. com., 9 mai 2018, n° 16-28.157, Bull. civ. Iv, n° 382 ; JCP éd. E., mai 2018, n° 22,
1283 : « Alors que la double qualité en laquelle intervient le signataire d'un acte juridique, d'une part à
titre personnel et, d'autre part, en qualité de représentant d'un tiers, n'imposant pas la nécessité d'une
double signature comme condition de validité de cet acte » ; déjà en ce sens Cass. com., 21 sept. 2010,
n° 09-15.773, JCP éd. N., janv. 2011, n° 3, 1006 ; ibid. n° 43, act. 745.
157. rappelons que seul le fiduciant-débiteur peut être qualifié de propriétaire durant l'opération
en cas de fiducie-sûreté, raison pour laquelle nos développements ne concernent pas cette dernière, sur
laquelle cf. supra n° 284 et s.
158. Philippe Malaurie, Laurent Aynès et Philippe Stoffel-Munck, Droit civil, Droit des
éd., 2020, n° 475 et s. ; françois Terré, Philippe Simler, Yves Lequette et
éd., 2018, p. 776 et s., n° 699 et s.
obligations, Defrénois, 11e
françois Chénedé, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 12e
159. Cass. civ., 8 févr. 1888, DP 1888, 1, 193.
160. Cf. désormais l'article 1206 du Code civil : « Le bénéficiaire est investi d'un droit direct à la
prestation contre le promettant dès la stipulation.
[...]
promettant » ; comp. ant. 1121.
161. Cass. 1re
La stipulation devient irrévocable au moment où l'acceptation parvient au stipulant ou au
civ., 21 nov. 1978, Bull. civ. I, n° 356 ; Defrénois, 1979, art. 32077, obs. Jean-Luc
civ., 8 déc. 1987, Bull. civ. I, n° 343 ; D. 1989, somm. 233, obs. Jean-Luc Aubert ;
Aubert ; D. 1980, p. 309 et s., note Caroline Carreau ; JCP 1980, II, 19315, note rodière ;
cf. également Cass. 1re
RTD civ. 1988, p. 532, note Jacques Mestre ; adde G. venandet, « La stipulation pour autrui avec
obligation acceptée par le tiers bénéficiaire », JCP 1989, I, p. 3391 et s.
162. Cf. en matière de fiducie not. art. 2028 ; en matière de stipulation pour autrui, art. 1206 al. 3
C. civ.
163. Cass. 1re civ., 24 mai 2005, Bull. civ. I, n° 223, D. 2006, p. 1025 et s., note Alexandra
Bensamoun ; RTD civ. 2005, p. 588, obs. Jacques Mestre et Bertrand fages ; Contrats, conc. cons. 2005,
comm. 165, obs. Laurent Leveneur ; JCP éd. G. 2005, I, p. 194, obs. Cécile Pérès-Dourdou ; RDC 2005,
p. 1007, obs. Denis Mazeaud : « Si le silence ne vaut pas à lui seul acceptation, il n'en est pas de même
lorsque les circonstances permettent de donner à ce silence la signification d'une acceptation ».
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