Droit civil - Droit des personnes - 12e - 77

n CHAPITRE II n
NATURE ET RÉGIME DU NOM
64. Cinq natures ? - La nature juridique du nom est depuis plus d'une centaine
d'années l'objet d'une controverse qui, à la longue, devient évanescente. Plusieurs
analyses ont été proposées.
1) La jurisprudence y a longtemps vu un droit de propriété, sorte de copropriété
familiale1
matière civile et avec la jurisprudence contemporaine où une personne peut se
voir interdire l'utilisation commerciale de son propre nom2
fait une institution de police civile, sorte d'immatriculation des personnes3
, mais inconciliable avec l'indisponibilité du nom telle qu'elle existe en
. 2) Planiol en avait
;ce
qui n'était guère compatible avec le pouvoir qu'a aujourd'hui la volonté des individus
(sous certaines limites) dans l'attribution du nom (prénoms, nom de famille
et nom d'usage) ; ce qui n'était pas compatible non plus avec le pouvoir de défendre
le nom en justice contre les usurpations par les tiers. 3)D'autres y avaient vu
une marque de la filiation et de l'état familial4
de la personnalité6
, ou un droit individuel5
, 4)un droit
.
ou un droit de l'homme lié au respect de la vie privée7
5)D'autres distinguent8 le nom commercial et le nom civil : le nom commercial
est approprié ; au contraire en matière civile le nom est, soit un aspect de l'état
(action en réclamation du nom ou en contestation contre les usurpateurs), soit un
droit de la personnalité (action contre l'atteinte au nom) ; dans ces hypothèses, il
1. La tête d'une longue série jurisprudentielle est Cass. req., 16 mars 1841, Jur. gén., vo
nom, no 19 ; S, 1841.I.352 : « Les noms patronymiques des familles sont leur propriété ; si les femmes,
Nom-Préen
entrant par le mariage dans une famille étrangère, cessent de porter le nom de leur père, ce nom,
les souvenirs d'estime et d'honneur qui peuvent y être attachés, sont un bien qui fait partie de leur
patrimoine et qui ne saurait manquer de leur être toujours précieux ».
2. Infra,no
85.
3. M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit civil, t. I, Pichon, 5e
éd., 1908, no
398 : « Le nom est une
institution de police civile ; il est la forme obligatoire de la désignation des personnes ; mais il n'est pas
plus un objet de propriété que ne le sont les numéros matricules ; il n'est pas aliénable : la loi ne le met
pas à la disposition de celui qui le porte, et elle l'établit beaucoup moins dans son intérêt que dans
l'intérêt général ».
4. A. COLIN,n. DP 1904.II.1, spéc. p. 2, col. droite, sous Paris, 21 janv. 1903 : « Les procès relatifs au
nom patronymique mettent en définitive en jeu une question de filiation, et le nom patronymique ne
nous paraît pas définissable autrement que comme la marque distinctive et extérieure de l'état, ou,
plus exactement encore, de cet élément de l'état qui réside dans la filiation, à l'un quelconque de
ses degrés. Toute question relative au nom de famille est donc, en principe, une question d'état ».
5. A. PONSARD, n. sous Cass. 1re
accentuer les prérogatives individuelles sur le nom ? On constate d'ailleurs que le nom est de moins
en moins le reflet de la situation familiale ».
6. C'est la position la plus répandue ; ex. : MARTY et RAYNAUD,no
tification personnelle et de rattachement à une famille » intéresse la vie privée et familiale de l'individu.
8.
J. CARBONNIER,no
36.
26 ; P. KAYSER, « La défense du nom
33 : le nom « en tant que moyen d'idenciv.,
16 nov. 1982, JCPG 1983.II.19954 : « Ne doit-on pas [...]
de la famille d'après la jurisprudence civile et la jurisprudence administrative », RTD civ. 1959.10 et s.
7. CEDH, 22 févr. 1994, Burghartz c. Suisse, cité supra,no
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