Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023 - 118

116
EMMANUEL DE MONREDON
bénéficie d'un rang important dans la hiérarchie des textes. Aux termes d'une
jurisprudence constante et ancienne, le Conseil constitutionnel a, jusqu'à ce jour,
refusé de se reconnaître compétent pour juger de la conformité d'une loi aux
stipulations d'un traité ou d'un accord international (111). Il a eu l'occasion de le
préciser en 2013 à propos de la CIDE (112), si bien que l'on ne trouve pas dans
sa jurisprudence de décision se référant directement à cette convention (113).
Au plan juridique, quoi qu'on en dise en Équateur, les décisions prises par
l'organisme de suivi de la CIDE, le Comité des droits de l'enfant, restent
en droit français de simples « suggestions et recommandations d'ordre général
» (114), transmises aux États parties à toutes fins utiles, et donc, par
nature, dépourvues de force exécutoire. C'est la première et principale raison,
de droit, pour laquelle la recommandation du Comité concernant les mineurs
et la tauromachie est restée sans suite en France.
Le Conseil constitutionnel ne s'est pas penché, à ce jour, sur la question de
l'accès des mineurs dans les enceintes taurines, et en particulier sur la recommandation
onusienne adressée à l'État français, parce qu'il n'a pas eu, comme
les cours suprêmes colombienne et mexicaine, à se trouver en présence de
dispositions réglementaires, nationales ou régionales, directement applicables
en la matière (115). Et si, à la différence de la Corte constitucional de
l'Équateur, il s'abstient de se référer à la CIDE, il y a toutes les raisons de
croire qu'il en serait de même à propos de simples suggestions ou recommandations
formulées par son organisme de suivi.
La communauté de principes attachés à la matière des droits de l'homme
rapproche, cependant, le Conseil constitutionnel de la CIDE. Bien que longtemps
après le Conseil d'État (116) et la Cour de cassation (117), le Conseil
(111) Cons. const., 15 janv. 1975, n° 74-54 DC ; Cons. const., 29 déc. 1989,
n° 89-268 DC.
(112) Cons. const., 17 mai 2013, n° 2013-669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples
de personnes de même sexe, cons. 57.
(113) Sinon par allusion. V. Cons. const., n° 2016-739 DC, 17 nov. 2016.
(114) CIDE, art. 45d.
(115) En tout état de cause, le Conseil constitutionnel estime qu'il n'a « pas à se
substituer au législateur quant à l'appréciation des dispositions qu'il convenait de
prendre afin d'assurer au mieux la protection de l'intérêt de l'enfant », in comm. déc.
Cons. const., 21 mars 2019, n° 2018-768 QPC.
(116) V. CE, 22 sept. 1997, Cinar : JCP G 1998, II, 10051, comm. Gouttenoire A. ;
RTD civ. 1997, p. 908, obs. Hauser J. ; Fossier T., Chron. dr. de la famille, JCP G 1998,
I, 101.
(117) Par deux arrêts du 18 mai 2005, la Cour de cassation a, pour la première
fois, affirmé l'applicabilité directe devant les juridictions françaises des articles 3-1
et 12-2 de la convention de New York. V. Cass. 1re
civ., 18 mai 2005 : JCP 2005, II,
10081, note Granet-Lambrechts F. et Strickler Y. ; Dr. famille 2005, comm. n° 156,
obs. Gouttenoire A. ; JCP 2005, II, 10115, concl. Petit C., note Chabert C. ; D. 2005,
p. 1909, note Egéa V. ; Defrénois 2005, p. 1418 et 1493, obs. Massip J. ; RTD civ.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 1-2023
Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023

Table des matières de la publication Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023
