Expertise Notariale - Usufruit, gestion de patrimoine et pratique notariale - 22

22 USUFRUIT, GESTION DE PATRIMOINE ET PRATIQUE NOTARIALE
A. L'usufruit légal du conjoint survivant
15. Régime et assiette de l'usufruit légal du conjoint. L'article 757 du Code civil
dispose que : « Si l'époux prédécédé laisse des enfants ou des descendants, le conjoint
survivant recueille, à son choix, l'usufruit de la totalité des biens existants ou la propriété
du quart des biens lorsque tous les enfants sont issus des deux époux et à la
propriété du quart en présence d'un ou plusieurs enfants qui ne sont pas issus des
deux époux ». Lorsque le défunt ne laisse que des enfants communs avec
son conjoint, le conjoint survivant bénéficie d'une option entre l'usufruit
de la succession et un quart en pleine propriété de celle-ci3. Le régime de
l'option est régi par les articles 758-1 et suivants du Code civil4. Elle est personnelle
au conjoint survivant, intransmissible et n'est enfermée dans
aucun délai (C. civ., art. 758-1). Un héritier peut l'inviter à opter par écrit,
auquel cas il a trois mois pour ce faire. À défaut d'option dans ce délai, il est
présumé avoir opté pour l'usufruit (C. civ., art. 758-3). De même, en cas de
décès avant d'avoir opté, le conjoint survivant sera présumé avoir choisi
l'usufruit (C. civ., art. 758-4). En pratique, l'option se fait dans l'acte de
notoriété, mais rien n'interdit de la faire figurer dans un acte séparé. À
défaut d'acte, l'option se prouve par tout moyen (C. civ., art. 758-2).
Lorsque le conjoint survivant opte pour l'usufruit légal de la succession, l'assiette
de sa vocation s'étend sur « la totalité des biens existants » (C. civ.,
art. 757).
Par conséquent, l'usufruit légal du conjoint survivant porte sur l'ensemble
des biens de la succession, en ce compris les biens constituant la réserve
héréditaire des descendants. Ces derniers voient donc leur réserve réduite
à la seule nue-propriété5. Ils devront attendre le décès du conjoint survivant
pour recouvrer la pleine propriété de leur réserve. C'est pour cette raison
que l'option pour l'usufruit n'est ouverte au conjoint qu'en présence d'enfants
communs, l'article 757 du Code civil s'opposant à tout démembrement
de propriété entre un enfant non commun et le conjoint survivant.
Les biens donnés par le défunt ne font pas partie de l'assiette de l'usufruit
légal, et ce que la donation ait été consentie en avancement de part ou hors
part successorale et quel qu'en soit le bénéficiaire. En conséquence, il est
tout à fait possible que les enfants aient été allotis de leur réserve héréditaire
par des donations en avancement de part, de sorte que l'usufruit du
conjoint survivant ne porte que sur des biens existants constituant la quotité
disponible.
3. M. Grimaldi, Droit des successions,8e
éd., LexisNexis, 2020, nº 198.
4. Ibid., nº 205.
5. V. Ph. Delmas Saint-Hilaire et J. Hauser, « Vive les donations entre époux ! », Defrénois 2003,
nº 1, p. 3.

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