Expertise Notariale - Usufruit, gestion de patrimoine et pratique notariale - 63

LES ASPECTS ÉCONOMIQUES DE L'ÉVALUATION DE L'USUFRUIT 63
propriétaire] qui déterminait la valeur vénale de l'usufruit à partir de la somme
actualisée des loyers futurs pour la durée de l'usufruit temporaire, exprimés en valeur
nominale et donc en prenant en compte l'inflation, tout en appliquant un taux d'actualisation
ne prenant pas en compte l'inflation. Or une telle méthode repose sur des
termes de calcul non homogènes et conduit par suite à une rentabilité interne de l'investissement
déséquilibrée entre l'usufruitier et le nu-propriétaire et à un partage
inexact, à la date de la cession, de la valeur en pleine propriété de l'immeuble entre
celle de l'usufruit et celle de la nue-propriété, cette méthode erronée ayant pour conséquence
que la somme de la valeur ainsi déterminée de l'usufruit et de la valeur vénale
de la nue-propriété soit supérieure au prix d'acquisition de la pleine propriété. En
statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit ».
Ainsi que l'expose Monsieur Benoudiz : « Pour obtenir une valeur de la pleine
propriété de 730000€en tenant compte de l'inflation de 3% du loyer, ilfaut actualiser
les flux au taux interne de rentabilité de 8,26%. La première méthode (5,26%
de taux d'actualisation sans inflation du loyer) donne, on l'a vu, une valeur de
l'usufruit sur 22ans de 493664€. La seconde méthode (8,26% de taux d'actualisation
avec une inflation du loyer de 3% paran) donne une valeur de l'usufruit sur
22ans de 486187€, soit une valeur très proche de celle découlant de la première
méthode (1,5% d'écart). En d'autres termes, peu importe la méthode retenue puisque
les résultats sont quasi identiques lorsqu'on actualise lesflux au TRI. Seules ces deux
méthodes permettent un partage équilibré entre l'usufruitier et le nu-propriétaire de la
valeur de la pleine propriété en offrant à chacun d'eux un taux de rendement interne
de l'investissement identique, condition indispensable pour conserver l'équilibre U+
NP= PP. En définitive, et cet apport est déterminant, le taux à retenirpour évaluer la
valeur d'un usufruit doit être le taux interne de l'investissement et celui-ci doit être
identique pour l'usufruitier et le nu-propriétaire»28.
Il est clair que l'évaluation économique de l'usufruit à durée fixe ne peut
avoir pour effet de survaloriser l'usufruit à durée fixe, dans la mesure où
l'usufruitier et le nu-propriétaire doivent se partager dans le temps les revenus
à tirer de la chose29. Par ailleurs, dans une période économique à taux
bas, il y a peu de raisons de tenir compte de l'inflation du revenu futur du
bien dont la propriété est démembrée. Surtout, l'actualisation repose sur le
constat selon lequel une certaine somme, à percevoir dans dix ans, a une
valeur moindre que la même somme à percevoir immédiatement. C'est
sans doute sur ce point que l'évaluation du contribuable était erronée. En
effet, ce dernier a retenu un taux de rendement net de charges usufructuaires
de 8,26 %, indexé à 3 %, sur une durée de vingt-deux ans, sans
28. L. Benoudiz, « L'évaluation d'un usufruit temporaire : quelle méthode ? quel taux ? »,
Dr.fisc. 2019, nº 6, 140, spéc. nº 6.
29. Une surévaluation de l'usufruit peut constituer un avantage occulte taxable, sur le fondement
de l'article 111-c du CGI, lorsque le nu-propriétaire est l'associé unique de la société usufruitière
soumise à l'impôt sur les sociétés (CAA Marseille, 15 sept. 2022, nº 20MA01722).
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