Mémentos - Droit administratif général - 11e - 58

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MÉMENTOS - DROIT ADMINISTRATIF GÉNÉRAL
2) L'atteinte à la séparation des pouvoirs
La primauté du droit de l'Union européenne et le contrôle de conventionnalité qui en
découle, ont entraîné, non sans résistance, l'abandon de l'un des fondements du droit
français : l'interdiction faite aux tribunaux de s'immiscer dans l'exercice du pouvoir législatif.
Cette interdiction trouve son origine dans le principe de séparation des pouvoirs qui
interdit au juge, à peine de forfaiture, de prendre toute mesure susceptible d'être assimilée
à une suspension de la loi. Le principe a été affirmé par la loi sur l'organisation
judiciaire des 16 et 24 août 1790 aux termes de laquelle « les tribunaux ne pourront
prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, ni
empêcher ou suspendre l'exécution des décrets du corps législatif [...] ».
Au nom du contrôle de conventionnalité, le juge peut désormais, sous certaines conditions,
tenir une loi pour non avenue.
3) L'atteinte à la souveraineté de l'État
La primauté du droit européen a conduit, à son tour, à la remise en cause d'une notion
encore plus fondamentale : la souveraineté. Car si la souveraineté est le monopole
d'édiction du droit positif par l'État, elle est aussi le monopole de son abrogation. La loi
du souverain ne peut faire l'objet d'une abrogation par un tiers. Or, lorsque le juge
n'applique pas une loi nationale pour défaut de conformité au droit européen, il lui
retire tacitement sa force obligatoire, ce qui revient à l'abroger. Cette situation peut
paraître choquante. En effet, le droit qui s'impose ainsi à la France émane d'instances
sans caractère démocratique. La Cour de justice de l'Union européenne n'a aucune légitimité
tandis que la Commission européenne qui est l'auteur d'une grande partie du
droit européen est tout simplement un organisme administratif.
C - Les conflits entre la loi et la Constitution
Le juge administratif s'estime incompétent pour procéder au contrôle de constitutionnalité
de la loi. Par deux arrêts de section rendus le 6 novembre 1936, Arrighi et Dame
veuve Coudert, le Conseil d'État a jugé « qu'en l'état actuel du droit public français, le
moyen tiré de l'inconstitutionnalité d'une loi n'est pas de nature à être discuté devant
le Conseil d'État statuant au contentieux ».
Eisenmann, dans son commentaire de ces deux arrêts, a souligné le motif fondamental
qui a déterminé le Conseil d'État à ne pas, selon ses propres termes, « sauter le pas » en
se reconnaissant ce pouvoir15
:« c'est la conscience qu'a le juge de sa propre
légitimité ».
Or cette légitimité ne lui donne pas le pouvoir de contrôler la conformité d'une loi à la
Constitution. Le rôle du Conseil d'État n'a, depuis 1936, pas substantiellement changé.
Dans son arrêt Mlle Deprez et Baillard du 5 janvier 2005, le Conseil d'État a confirmé la
jurisprudence Arrighi, en se fondant cette fois-ci sur l'article 61 de la Constitution de
1958, qui confie au Conseil constitutionnel le soin de contrôler la conformité des lois à
la Constitution.
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15. CE, 6 nov. 1936, Arrighi et Dame veuve Coudert : D. 1938.3.1, note Eisenmann C.

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