Les Carrés Rouge - L'essentiel du régime général des obligations - 7e - 107

CHAPITRE 10 - La délégation
105
b) Le principe de l'inopposabilité des exceptions consacrée par l'ordonnance
de 2016
L'article 1336, alinéa 2 du Code civil est porteur du principe de l'inopposabilité des exceptions, aux
termes duquel le délégué ne peut pas opposer au délégataire les exceptions tirées des rapports
fondamentaux préexistants établis entre lui-même et le délégant ou de ceux liant le délégant et
le délégataire. Cette règle s'explique par le caractère nouveau et autonome de l'engagement pris
par le délégué et met en partie fin au brouillard doctrinal et jurisprudentiel qui persistait.
En effet, la question subsistait de savoir si le délégué pouvait se prévaloir des exceptions tirées du
rapport entre lui-même et le délégué et entre le délégant et le délégataire dans l'hypothèse d'une
délégation incertaine :
- lorsqu'étaient en cause les exceptions tirées du rapport délégué-délégant, les arrêts
rendus par la Cour de cassation sur ce point donnaient lieu à des interprétations doctrinales
divergentes. Certains auteurs considéraient qu'en pareilles circonstances il convenait d'appliquer
le principe d'inopposabilité des exceptions, et se fondaient pour ce faire sur un arrêt rendu par
la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 22 avr. 1997, nº95-17664), aux
termes duquel « dans la délégation de créance, le délégué ne peut opposer au délégataire les
exceptions nées de ses rapports avec le délégant ». D'autres auteurs estimaient au contraire
que le principe de l'inopposabilité des exceptions tirées des rapports délégué-délégant était de
mise, mais qu'il pouvait être écarté lorsque l'obligation du délégué à l'égard du délégataire
était calquée sur celle existant entre le délégué et le délégant ;
- lorsqu'étaient en cause les exceptions tirées du rapport délégant-délégataire, la jurisprudence
de la chambre commerciale et celle de la chambre civile de la Cour de cassation étaient
divergentes sur ce point.
Dans un arrêt de février 1992 (Cass. com., 25 févr. 1992, nº90-15707), la chambre commerciale
de la Cour de cassation a considéré qu'« en cas de délégation de paiement imparfaite, le délégué
ne peut, sauf clause contraire, opposer au délégataire les exceptions dont le délégant pouvait se
prévaloir à l'égard de celui-ci ». Autrement dit, la chambre commerciale posait le principe
d'inopposabilité des exceptions, principe que les parties pouvaient évacuer par clause contraire.
Àl'inverse, la première chambre civile de la Cour de cassation énonçait quelques jours plus tard,
dans un arrêt de censure de mars 1992 relatif à une délégation imparfaite (Cass. 1re
1992, nº90-15707), que « sauf convention contraire, le délégué est seulement obligé au
paiement de la dette du délégant envers le délégataire, et qu'il se trouve déchargé de son
obligation lorsque la créance de ce dernier est atteinte par la prescription ». En d'autres termes,
la première chambre civile de la Cour de cassation posait le principe d'opposabilité des
exceptions auquel les parties pouvaient échapper par clause contraire.
civ., 17 mars
Les Carrés Rouge - L'essentiel du régime général des obligations - 7e

Table des matières de la publication Les Carrés Rouge - L'essentiel du régime général des obligations - 7e
