Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e - 205

GESTION DES BIENS COMMUNS
205
I. - Legs
225. Personnel et post-mortem. - Le legs est une disposition d'une nature particulière.
Il est, comme la donation, un acte gratuit, mais en raison de sa nature, il
échappe à la cogestion20
et à la gestion concurrente, non seulement en raison du
caractère personnel et unilatéral du testament, mais aussi parce que ne produisant
ses effets qu'au décès du testateur, les pouvoirs de son conjoint ne sont pas susceptibles
d'influer sur sa validité. L'époux peut donc disposer par un legs de sa
part dans la communauté comme le ferait tout copropriétaire.
La règle s'est toujours appliquée, et sans difficulté ; lorsque le legs est universel
; le legs ne porte alors que sur la part du testateur dans la
ou à titre universel21
communauté, c'est-à-dire la moitié. Au contraire, elle a suscité des difficultés lorsqu'il
s'agit d'un legs particulier ayant pour objet un bien commun déterminé.
La règle traditionnelle faisait, au moins formellement, une distinction entre le mari et la
femme22
en valeur dans le cas contraire23
. Le legs du mari s'exécutait en nature si le bien était mis par le partage dans son lot,
. Au contraire, disait-on généralement, s'il s'agissait de la
femme, le legs n'était pas valable si le bien était mis dans le lot du mari, car il était un legs de
la chose d'autrui. Curieusement, la loi de 1965 avait maintenu cette distinction entre le mari et
la femme, qui avait encore moins de sens ici qu'ailleurs ; mais la jurisprudence sauvait presque
tous les legs de la femme, en découvrant une volonté tacite de la testatrice de faire ces legs en
valeur si le bien légué avait été mis au lot du mari24
, ce qui la plaçait dans la même situation que
celui-ci.
La loi de 1985 supprime toute distinction entre le mari et la femme (art. 1423).
Consacrant la jurisprudence antérieure, elle décide que le legs d'un bien commun
par un époux est valable, mais ne peut excéder sa part dans la communauté ; sa
portée dépend de la volonté du testateur et il faut aussi distinguer selon que le legs
a été fait au conjoint ou à un tiers. Lorsqu'il a été fait au conjoint, le testateur peut
avoir eu l'intention de lui donner le droit de prélever en nature la chose léguée25
.
Lorsqu'il a été fait à un tiers, il s'exécute en nature si le partage l'attribue au testateur,
en valeur dans le cas contraire ; s'il n'y a pas de partage, parce que le
conjoint survivant recueille l'intégralité de la succession, le legs doit s'exécuter
en nature ; le légataire ne doit indemniser la communauté que si le testateur l'a
prévu, ce qui se produit rarement. Ces questions soulèvent peu de contentieux.
II. - Partage
226. Acte d'héritier. - Avant la loi de 1985, des dispositions singulières donnaient au mari
des pouvoirs exorbitants : c'était le mari qui, sans ou avec le consentement de l'épouse,
20. Supra, no
63.
21. Ex. : je lègue à Pierre tous les droits que j'ai dans la communauté ; ou bien, le tiers de mes droits.
22. C. Nap., art 1423, al. 1 : « La donation testamentaire faite par le mari ne peut excéder sa part
dans la communauté. » Cf. aussi la coutume de Paris, art. 296 : « Le mari par son testament ou ordonnance
de dernière volonté ne peut disposer des biens meubles et conquêts immeubles, communs
entre lui et sa femme, au préjudice de sa dite femme, ni de la moitié qui peut lui appartenir en deux,
par le trépas de son dit mari. »
23. C. Nap., art. 1423, al. 2 : « S'il (le mari) a donné en cette forme un effet de la communauté, le
donataire (sic) ne peut le réclamer en nature, qu'autant que l'effet, par l'événement du partage, tombe
au lot des héritiers du mari ; si l'effet ne tombe point au lot de ses héritiers, le légataire a la récompense
de la valeur totale de l'effet donné, sur la part des héritiers du mari dans la communauté. »
24. Ex. : Cass. 1re
n. M. Dagot ; n.p.B.
25. P. VOIRIN,n. JCPG 1960.II.17780.
civ., 28mai 1968, dame Neveu, D. 1969.95, n. Ph. Malaurie ; JCPG 1969.II.15714,
Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e

Table des matières de la publication Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e
