Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e - 224

224
DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX
§1.TRANSFERT D'ADMINISTRATION
Le transfert d'administration peut être ou conventionnel, dans une situation de
confiance, ou judiciaire, dans une situation de crise.
251. 1o Mandat. - Un conjoint peut, par convention, donner mandat à son
époux afin qu'il gère ses propres (art. 218). Ce sont les règles du mandat qui s'appliquent
alors : seul l'époux mandant est tenu des dettes engagées par le mandataire
; l'époux mandataire répond de sa gestion, mais selon la responsabilité atténuée
du mandataire à titre gratuit (art. 1992, al. 2)13
. Le droit du mandat comporte
une exception qui est d'importance : l'époux mandataire est dispensé de rendre
compte des fruits, à moins que la procuration ne «l'y oblige expressément »
(art. 1431)14
.
Le mandat a toujours un caractère provisoire, comme souvent le transfert judiciaire
de pouvoirs.
252. 2o
Transfert judiciaire. - 1o
Dans des situations qui paraissent temporaires,
les articles 217 et 219 permettent une extension de pouvoirs, par le recours
aux mécanismes de la représentation judiciaire ou de l'autorisation judiciaire,
lorsqu'un époux est hors d'état de manifester sa volonté ou met en péril les intérêts
de la famille15
.
2o Dans les situations durables, la loi prévoit la possibilité de transférer judiciairement
les pouvoirs du conjoint sur ses propres (art. 1429), presque de la même
manière qu'elle a organisé un transfert de pouvoirs sur les biens communs
(art. 1426)16
, à quelques différences près. La règle limite la plénitude de pouvoirs
qu'a un époux sur ses propres et aboutit à un retrait de pouvoirs.
D'une part, le transfert peut être accordé au conjoint ou à un tiers, administrateur
judiciaire. D'autre part et surtout, au lieu de viser l'inaptitude ou la fraude
conjugales comme dans l'article 1426, l'article 1429 s'attache à l'époux qui
« met en péril les intérêts de la famille, soit en laissant dépérir ses propres, soit
en dissipant ou détournant les revenus qu'il en retire ». À la différence d'un
époux séparé de biens ou d'un célibataire, qui sont, l'un et l'autre libres de faire
ce qu'ils veulent, un conjoint commun en biens doit convenablement gérer sa
fortune personnelle et même en affecter les revenus à la communauté17
;l'époux
n'a pas, en effet, une pleine indépendance sur ses propres, qui demeurent affectés
aux besoins du ménage. Comme à l'article 1426, cette condition du transfert de
pouvoirs est exigée alternativement à l'empêchement d'un époux qui « se trouve,
d'une manière durable, hors d'état de manifester sa volonté ».
Lorsque le transfert de pouvoirs bénéficie au conjoint, il aboutit à une unité d'administration,
qui comporte deux limites. 1º) Il ne confère pas le pouvoir de disposer. L'époux habilité a seulement
l'usufruit des biens propres du conjoint dessaisi. L'article 1429, alinéa 3 prévoit, en effet,
qu'« à compter de la demande, l'époux dessaisi ne peut disposer seul que de la nue-propriété de
13. Droit des contrats spéciaux, coll. Droit civil.
14. Ex. : si le mari a le pouvoir de gérer les fonds propres de sa femme, il peut les dépenser, sauf
stipulation contraire expresse.
15. Supra, nos
16. Supra, no
86 à 87.
238.
17. Cependant l'époux qui exploite un fonds de commerce propre où il investit ses bénéfices ne
314.
commet pas de détournement, mais un acte de bonne gestion : A. COLOMER, Les régimes matrimoniaux
et le droit commercial, éd. Defrénois, 1977, no
Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e

Table des matières de la publication Droit civil - Droit des régimes matrimoniaux - 9e
