Centraliens - N°629 - La revue des Arts et Manufactures - Octobre/Novembre 2013 - 32

Dossier

CdeC,

by Cordelia de Castellane
Comment une PME de
votre taille fait-elle pour se
faire une place dans l'univers
du luxe ?

Erwan Cordelle
ECP 2006, passé
par la filière Centrale Entrepreneur,
Erwan débute sa
carrière dans la micro-finance. Après
avoir lancé une banque de micro-crédit
au Sénégal pendant 3 ans (380 employés
aujourd'hui), il décide de rentrer en
France, passe une licence de droit (Assas
2010) et suit les traces de bon nombre de
ses anciens camarades en entrant dans le
conseil en stratégie. Après deux années
passées chez A.T. Kearney, il décide
de retourner vers ce qui le passionne :
l'entrepreneuriat. Aujourd'hui à la tête
de la marque de prêt-à-porter pour enfants CdeC by Cordelia de Castellane, il
supervise une équipe de 40 personnes et
assure en parallèle la direction financière
du groupe.

Comparativement aux grands acteurs, nous
sommes encore une fourmi dans ce secteur.
Mais cela nous donne une force incroyable
pour saisir les opportunités qui se présentent
et innover au quotidien. Depuis maintenant plus de 6 ans, notre objectif affiché est
de « démocratiser le luxe pour l'enfant » à
travers des produits de grande qualité, des
collections très abouties et des prix tout à
fait abordables. C'est un pari réussi puisque
l'engouement pour nos produits nous a permis d'être aujourd'hui présents dans plus
de 20 pays en Europe, en Asie, aux USA et
au Moyen-Orient, tout en gardant un prix
moyen jusqu'à deux fois inférieur à celui de
marques emblématiques comme Bonpoint.
C'est aussi un milieu qui a ses codes et il faut
bien les connaître pour se faire connaître.
En cela, Cordelia est une experte hors pair.
Actuellement aussi Directrice Artistique
de Baby Dior, elle navigue dans cet univers
comme personne ; et sait mieux que quiconque exporter la French Touch tant enviée
dans la mode enfantine.

Les grands leaders du luxe
(LVMH, Kering, Hermès)
connaissent une croissance
sans précédent, les plus
petites marques bénéficientelles de cet engouement
pour le luxe à la française ?
Effectivement, le secteur du luxe semble
aujourd'hui protégé de la crise ambiante, et
il est vrai que nous souffrons probablement
moins que de nombreux autres petits acteurs
du textile. Notre style « bob-chic parisien »
plaît beaucoup en France et s'exporte aussi
très facilement aux États-Unis et en Asie, qui
sont des relais de croissances très forts pour
des structures de notre taille. Ainsi, nos exportations représentent plus de la moitié de
notre chiffre d'affaires. Mais le textile est un
secteur très dur, qui souffre beaucoup de la
stagnation du pouvoir d'achat, sans compter
que le chiffre d'affaires est fortement dépen-

dant de la météo. Si vous n'avez pas les reins
assez solides ou faites une erreur en phase
d'achat, il suffit de 6 mois pour vous mettre
au tapis. Il faut donc savoir rester très vigilant
et être en mesure de réagir très rapidement.

La France est le « berceau »
du luxe, comment capitalisezvous sur cette perception ?
Si la France bénéficie encore aujourd'hui de
cet épithète, c'est que les fondamentaux qui
ont assuré la propagation de la « mode à la
française » sont encore présents en France.
Un savoir-faire ancestral, des ateliers de
renom et des artisans expérimentés ont survécu, et ce, en grande partie grâce au soutien
de groupes comme LVMH ou Chanel qui ont
résisté à la tentation de la délocalisation.
L'image de la France dans notre secteur est un
vrai plus. Le nom de la marque, qui est aussi
celui de la fondatrice et directrice artistique,
permet immédiatement de nous identifier
comme acteur français et cela a un impact
non négligeable sur nos clients et nos revendeurs, qui connaissent bien la sensibilité de
leurs clients finaux pour le luxe hexagonal.
Les petites marques comme la nôtre ont tout
intérêt à surfer sur cette réputation.

La vente en ligne :
une opportunité ?
Notre site de vente en ligne (www.cdec.fr)
connaît une croissance à trois chiffres depuis
plusieurs années. C'est un outil de communication incroyable car chaque nouvelle collection est instantanément visible et disponible
dans le monde entier. Nous recevons même
des demandes d'ouverture de franchises de
gens qui nous ont connus en ligne. De plus,
grâce à des acteurs comme Vente-Privée.com
par exemple, l'achat de vêtements en ligne
s'est largement démocratisé et les réticences
à acheter des vêtements en ligne n'ont rien à
voir avec ce qu'elles étaient il y a encore cinq
ans. Enfin, si les outils techniques de back-office disponibles sont bien rodés, il serait impensable pour nous de sous-traiter la partie
visible. L'animation de notre communauté, la
mise en avant de produits et la rotation fréquente des collections nécessite un réel investissement humain et financier.

Centraliens no629 [octobre/novembre 201
3]

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