Bibliothèque de droit public - Tome 333 - Nouvelles recherches sur la condition juridique des établissements publics - 222

222 NOUVELLES RECHERCHES SUR LA CONDITION JURIDIQUE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
de la propriété intellectuelle4. Pour caractériser l'existence d'un établissement, il faut
en général plusieurs éléments : une activité, des moyens humains et matériels pour la
réalisation de cette activité et une direction unique autonome. De la même manière,
pour identifier la réalité d'un établissement public, et notamment pour s'assurer qu'il
est bien distinct de l'Administration publique, le Conseil d'État vérifie que ses administrateurs
disposent de moyens et de garanties suffisants pour réaliser la mission qui
leur a été confiée et qu'ils sont autonomes dans la gestion de ces moyens. Le Conseil
d'État a ainsi reconnu qu'un établissement dont « les modalités de fonctionnement le
priveraient de toute autonomie » serait considéré « comme intégré à un service de la
collectivité qui en assure la tutelle »5. La question n'est pas de savoir si, à l'image de
la théorie de la transparence appliquée aux associations privées6, une personne
publique intervient dans la création et le fonctionnement de l'association. Cette théorie,
qui a été développée par le juge administratif pour révéler la réalité du fonctionnement
d'une personne morale privée et démasquer la personne publique qui la dirige
afin de lui appliquer certaines règles du droit public, est en effet « naturellement opposée
aux établissements publics »7, car le lien direct avec l'autorité politique et la surveillance
de leur administration leur sont consubstantiels.
Après avoir identifié un établissement par les moyens mis à disposition des
administrateurs pour la réalisation de la mission dont ils ont la charge (§ 1), le juge
administratif veille à la protection de son intégrité conformément aux statuts fixés
par l'autorité politique. Aucune autorité ou individu extérieur non habilité ne peut
s'immiscer dans sa gestion. Normativement, le principe d'autonomie implique seulement
que la mission d'un établissement public soit réalisée par les administrateurs
auxquels les textes institutifs l'ont confiée (§ 2).
§1. L'EXISTENCE DE MOYENS POUR LA RÉALISATION DE L'OBJET
STATUTAIRE
347. Depuis l'émergence des premiers établissements publics, la forme de l'établissement
public a toujours impliqué une autonomie de gestion des administrateurs.
Ainsi, bien que leur administration ait toujours été soumise au contrôle d'une autorité
supérieure, Jean Imbert identifie trois éléments de l'autonomie de gestion des hôpitaux
: une direction qui décide de l'administration des hôpitaux, un personnel propre
et des ressources suffisantes pour assurer sa mission8. Ces considérations sont proches
de celles, plus récentes, de la Cour des comptes, présentées dans un rapport d'observations
sur l'établissement public foncier de Normandie, dans lequel elle rappelle le
« principe d'une organisation autonome ». Elle s'assure que les organes de l'établissement
public, notamment le conseil d'administration, agissent effectivement dans
4. Sur la notion d'« établissement » de l'article 97§ 1, du règlement nº 207/2009 sur la marque communautaire
déterminant la compétence de l'État membre sur le territoire duquel le défendeur a un établissement
pour le règlement des litiges en matière de contrefaçon et de validité des marques communautaires,
voyez l'arrêt de la CJUE du 18 mai 2017, Hummel Holding, aff. nº C-617/15, pts. 37-38.
5. CE, 22 mai 2009, Fritch, nº 322030, Lebon T. et CE, 9 février 2012, Escala, nº 347155, inédit.
6. Sur la théorie de la transparence, voyez notamment Thomas Cortes, La personnalité morale
comme technique de droit public, op. cit., p. 251. Elle a été surtout appliquée aux associations.
7. Marc Le Roy, « Transparence et fictivité à l'épreuve de la notion d'établissement public », La
Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales, nº 4, 21janvier 2008, 2014, p. 27.
8. Jean Imbert, Le droit hospitalier de l'Ancien Régime, op. cit., p. 199 et s.

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