Bibliothèque de droit privé - Tome 625 - Quasi-contrat et enrichissement injustifié - 168

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QUASI-CONTRAT ET ENRICHISSEMENT INJUSTIFIÉ
priori à tracer, mais elles souffrent vraisemblablement de cette simplicité qui n'apportent
pas toujours les réponses les plus adaptées. Alors que le droit français ne fait
pratiquement aucune distinction et tend à classer l'intégralité de ces restitutions dans
le droit des contrats286, le droit allemand fait le départ selon que le contrat a été
anéanti rétroactivement (application de l'enrichissement injustifié) ou non (application
du droit des contrats)287.Il n'est pas certain que ce critère temporel soit particulièrement
pertinent, car l'absence d'anéantissement rétroactif ne signifie pas pour
autant que le contrat est apte à justifier les restitutions qui suivent. En se focalisant
non pas sur l'anéantissement du fondement juridique (contrat) mais sur ce qu'ont réellement
souhaité les parties et les contreparties effectivement reçues, le droit anglais
apporte nous semble-t-il des réponses plus adaptées. Il convient d'emblée de noter
que, si les juristes anglais connaissent la différence entre un anéantissement rétroactif
et non rétroactif, la notion de rétroactivité, au moins s'agissant de l'unjust enrichment,
est finalement perçue comme artificielle, raison pour laquelle la majorité des auteurs
préfèrent se concentrer sur le caractère conditionnel ou non du transfert.
175. La réponse du droit anglais : le critère de la condition. En l'état du droit
positif, le droit anglais l'unjust enrichment peut être invoqué dans plusieurs hypothèses
: lorsque le contrat a été annulé, ou lorsqu'il a été résilié et que le demandeur
souhaite être replacé dans la position qu'il devrait occuper si le contrat n'avait pas
été conclu. Cela suppose toutefois qu'il n'existe pas de stipulations spécifiques dans
le contrat organisant précisément cette hypothèse288, ce qui se comprend par l'idée
que les règles de l'unjust enrichment ne sont pas d'ordre public. De la même manière
que chaque personne est libre de disposer de ses biens, elle peut également organiser
les conditions dans lesquelles le transfert d'un de ses biens peut être remis en cause.
Allant plus loin, une partie de la doctrine anglaise estime qu'il n'est pas nécessaire
que le contrat ait été anéanti pour invoquer les règles de l'unjust enrichment, bien
que cela n'ait pas encore été expressément repris par la jurisprudence289. Le droit
anglais ne met pas l'accent sur l'absence de fondement au transfert ou l'anéantissement
de l'acte juridique justifiant le transfert de l'enrichissement - il ne s'agit
pas d'un modèle d'enrichissement injustifié. Il faut surtout regarder si le demandeur
a conditionné le transfert de l'enrichissement à une contreprestation particulière. Si
cette contreprestation n'est pas fournie, ou ne peut plus être fournie, le transfert de
principe, le professeur Viney estime qu'en cas de lacunes des règles des quasi-contrats, il faut se reporter
286. Voir sur l'étude du droit français infra nº 499. On peut toutefois noter que les apports de la
réforme du 10 février 2016 sont sur ce point particulièrement faibles, en dépit de l'introduction d'un chapitre
consacré aux restitutions. En effet, il n'est pas question du fondement de ces restitutions alors qu'un
régime commun est prévu quelle que soit la cause des restitutions, nullité, caducité, répétition de l'indu ou
la résolution.
287. Sur le droit allemand voir supra nº 59.
288. J. BEATSON, A. BURROWS, J. CARTWRIGHT, Anson's Law of Contract, 30e
University Press, 2016, p. 27.
289. Ainsi le professeur Burrows estime qu'il faut plutôt regarder s'il existe dans les faits un risque
de détournement du contrat. Il ajoute que la notion de failure ofconsideration est normalement suffisamment
encadrée pour éviter ce risque, A. BURROWS, op. cit., p. 329 : « Restitution for failure of consideration
does not contradict the contract (and hence the parties' risk allocation) because, had it been known that
the consideration would fail, the contractual obligation to render the benefit would not have arisen. The
failure of consideration means that there is no contractual obligation to render the benefit as well as meaning
that there can be restitution in respect of the benefits rendered " . Sur la notion defailure ofconsideration
voir supra nº 116 et s.
ed., Oxford

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