Revue - Droit & Société N°111-2022 - 185

Les élus locaux au défi de la protection des droits de l'homme : entre « vœux pieux » et « lignes d'horizon »
collectivité pouvait être choisie en cas de cumul des mandats), leurs mandats et
fonctions, des éléments de trajectoire sociale et professionnelle, leurs connaissances
et usages des textes de référence dans le champ des droits de l'homme, ainsi
que leurs priorités en la matière et les dispositifs locaux mis en place à cette fin
(accès au droit, formation des agents, évaluation).
L'analyse des réponses a consisté, d'abord, à préciser les contours de l'échantillon.
À cet égard, les difficultés à caractériser la population de référence des élus locaux
français constitue a priori un obstacle en termes de représentativité, les informations
fournies par le Répertoire national des élus (RNE) étant restreintes 51. Notre échantillon
s'est limité, en outre, à 500 répondants ayant complété le questionnaire de façon
exploitable ; ceux-ci ont, d'abord, été retenu en fonction des informations obtenues
sur leur collectivité (taille, statut, majorité politique), puis des précisions relatives à leur
trajectoire personnelle et à leurs perceptions et usages des droits de l'homme, certaines
questions sans obligation de réponse ayant été fréquemment éludées. On constate
ainsi une surreprésentation d'élus de communes de plus de 10 000 habitants
(15,2 %) ou des régions (5,4 %) et départements (6,7 %) 52. Ce biais permet néanmoins
de mettre statistiquement en relation les caractéristiques de ces sous-populations avec
celles des élus de petites et moyennes communes. La sous-représentation de ces derniers,
au regard de leur immense majorité parmi les conseillers municipaux, peut être
liée d'emblée à un manque d'intérêt pour un sujet comme les droits de l'homme dont
on montrera en détail à quel point ils peuvent apparaître lointains.
L'étape suivante a consisté à mettre en valeur la diversité des représentations et
usages des droits de l'homme des élus, en les rapportant à leurs caractéristiques et
à celles de leurs collectivités. La combinaison de techniques d'analyse des correspondances
multiples (ACM) et de classification ascendante hiérarchique (CAH)
s'est avérée appropriée 53. Dans un premier temps, l'ACM a synthétisé des corrélations
des modalités de variables et fait apparaître un espace des perceptions et
pratiques des droits de l'homme. La CAH a, ensuite, permis d'établir des regroupements
d'élus selon leurs coordonnées dans cet espace dont les profils sont mis
en valeur et liés aux données pertinentes de l'enquête par entretiens. Le contenu
des matériaux qualitatifs a enrichi, ce faisant, l'analyse quantitative en donnant du
sens aux corrélations observées et de la chair aux regroupements statistiques opérés
54 parmi les élus locaux interrogés.
II. Esquisse des représentations et usages des élus locaux en matière de droits
de l'homme
L'analyse des données permet, dans un premier temps, de dessiner un espace
des représentations et usages des droits de l'homme à la fois socialement et politi51.
ID., « Le profil social des maires de France », article cité.
52. En 2020, 97,1 % des communes françaises comptaient moins de 10 000 habitants.
53. Brigitte LE ROUX et Henry ROUANET, Multiple Correspondence Analysis, Thousand Oaks : Sage Publications,
2010.
54. Pascale DIETRICH-RAGON, Marie LOISON-LERUSTE et Manuela ROUPNEL, « Articuler les approches quantitative
et qualitative », in Serge PAUGAM (dir.), L'enquête sociologique, Paris : PUF, 2010, p. 357-377.
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