L'ÉNUMÉRATION DES INFRACTIONS ENGENDRANT UNE PLURALITÉ DE VICTIMES 105 juridiques de nature différente. Lorsque le délinquant lèse et met en danger quatre biens juridiques concrets, il ne réalise donc pas quadruplement l'exigence légale mais seulement doublement. Il en découle que seules deux infractions semblent pouvoir être cumulées pour ce même fait. Leur nombre correspondrait alors à celui des victimes dont la prise en compte pourrait ainsi être assurée. 200. Énumération différente : exemple de la lésion et de la mise en danger abstraite d'une pluralité de biens juridiques individuels. La seconde hypothèse se présente lorsqu'une infraction simple incrimine par exemple la lésion d'un bien juridique et la mise en danger abstraite d'un autre bien juridique d'une nature distincte. La question est alors toujours la même de savoir comment compter ce type d'infractions lorsque leur commission engendre une pluralité de victimes. Prenons ainsi l'exemple de l'incendie volontaire d'une maison appartenant à deux propriétaires qui ne s'y trouvaient pas et n'ont donc pas été concrètement exposés au danger. L'article 322-6 du Code pénal incriminant seulement un risque abstrait pour l'intégrité physique des personnes, l'infraction qu'il sanctionne est pleinement constituée mais la question se pose de savoir s'il en existe plusieurs. Or, trois biens juridiques peuvent être énumérés à raison d'une double atteinte à la propriété et d'une mise en danger abstraite de l'intégrité physique. De là, deux solutions peuvent être envisagées. 201. Première solution. La première consisterait à estimer qu'il existe autant d'infractions que de biens juridiques en présence. Dans l'exemple donné, le même fait donnerait ainsi lieu au cumul de trois infractions. Admettre une telle solution reviendrait toutefois à cumuler de façon contestable davantage d'infractions lorsqu'elles incriminent cumulativement une lésion et un risque abstrait que lorsqu'elles incriminent cumulativement une lésion et un risque concret - qui ne donneraient lieu qu'à deux infractions dans le même exemple -. En outre, elle méconnaît que l'infraction du législateur protège déjà deux biens juridiques de sorte que le délinquant ne réalise donc pas triplement les prévisions légales lorsque son fait atteint ou met en danger trois biens juridiques. Une autre solution peut alors être préférée. 202. Deuxième solution. Une deuxième solution consisterait à tenir uniquement compte du bien juridique protégé à titre principal. La place de l'article 322-6 dans le Code pénal suggérerait alors que l'infraction incriminée protège avant tout la propriété de sorte que le risque abstrait pour l'intégrité physique n'y serait réprimé qu'à titre subsidiaire. Dans l'exemple présenté, cette analyse conduirait alors à penser que le fait unique pourrait donner lieu à un cumul de deux infractions puisque deux victimes ont été atteintes dans leur propriété. Cette solution permettrait alors de tenir compte de la pluralité de victimes tout en ne méconnaissant pas la pluralité de biens juridiques protégés cumulativement par l'infraction simple. 203. Transition. En admettant que l'énumération de ce type d'infractions s'opère en tenant seulement compte du bien juridique protégé à titre principal par l'infraction simple, il serait ainsi possible de multiplier les infractions à raison de la pluralité de victimes sans négliger la spécificité des infractions simples protégeant cumulativement plusieurs biens juridiques distincts. La prise en compte de la pluralité de victimes par le cumul d'infractions est en revanche plus difficile lorsque c'est l'infraction aggravée qui protège cumulativement une pluralité de biens juridiques. b) La pluralité de biens juridiques protégés cumulativement par l'infraction aggravée 204. Pluralité de victimes identiques ou non. Il arrive assez fréquemment que les circonstances aggravantes légales sanctionnent la lésion ou la mise en danger d'un