Bibliothèque des sciences criminelles - Tome 74 - La pluralité de victimes en droit pénal - 85

L'ÉNUMÉRATION DES INFRACTIONS ENGENDRANT UNE PLURALITÉ DE VICTIMES
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a été déplacé par la Loi nº 2001-504 du 12juin 2001 pour figurer désormais à l'article
223-15-2 du Code pénal. Mais, quoiqu'hier une infraction contre les biens, aujourd'hui
une infraction contre les personnes, l'abus d'état d'ignorance ou de faiblesse n'a
vraisemblablement pas entre-temps changé profondément de nature. Il est donc difficile
d'admettre que cette infraction puisse maintenant faire l'objet d'un cumul qui
aurait auparavant été exclu au seul motif de son déplacement au sein du code.
139. Aspect personnel de la protection des biens. En troisième lieu, cette distinction
entre les infractions contre les personnes et les infractions contre les biens
paraît se justifier d'autant moins que certaines infractions relatives aux biens protègent
des valeurs autrement plus personnelles qu'il n'y paraît. Ainsi, l'escroquerie126
peut être considérée comme protégeant moins la propriété que la confiance de la personne
trompée. Il peut a fortiori en être ainsi - son nom l'indique - de l'abus de
confiance127.
140. Protection cumulative de la personne et des biens. Enfin, certaines
infractions ne sont radicalement ni des infractions contre les personnes ni des infractions
contre les biens mais les deux à la fois. Il en va par exemple ainsi de la destruction,
dégradation ou détérioration du bien d'autrui présentant un danger pour les
personnes128. Tel est également le cas de l'extorsion dès lors qu'elle suppose l'emploi
de la contrainte, de la violence ou de la menace de violences129. Le chantage130 peut
aussi être évoqué, dont le texte d'incrimination exige la menace de « révéler ou d'imputer
des faits de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération » alors
que cet élément est par ailleurs caractéristique de la diffamation qui, s'agissant de la
contravention131, est contenue dans le Code pénal au sein des infractions contre les
personnes. Leur régime dépendrait donc de leur place dans le Code pénal alors que
chacune de ces infractions semble protéger les personnes comme les biens.
141. Justification contestable de l'exclusion des infractions contre les biens.
À cela s'ajoute que cette proposition de traiter différemment les infractions contre les
personnes et celles contre les biens, pour que les premières se comptent en fonction
du nombre de victimes et non les secondes, paraît d'autant plus pouvoir être remise en
cause que les raisons qui ont présidé à une telle suggestion sont susceptibles d'être
contestées.
142. Indifférence de l'objet matériel de l'infraction. En premier lieu, il a été
considéré que la pluralité de victimes ne devait pas conduire au cumul des infractions
contre les biens au motif qu'elles ne portaient pas sur la personne de la victime
elle-même. Haus, après avoir énoncé que « la soustraction d'une malle qui contient
des effets appartenant à des propriétaires différents, ne constitue qu'un seul vol »,
justifiait la solution ainsi préconisée par l'affirmation selon laquelle «l'objet immédiat
et direct du crime ou du délit est la malle soustraite »132. Elle semble exacte mais
partiellement car elle ne paraît se vérifier qu'au regard de l'objet matériel de
126. C. pén., art. 313-1.
127. C. pén., art. 314-1.
128. C. pén., art. 322-5 et 322-6.
129. C. pén., art. 312-1.
130. C. pén., art. 312-10.
131. C. pén., art. R. 621-1. La diffamation délictuelle figure quant à elle à l'art. 29 de la Loi du
29juill. 1881 sur la liberté de la presse.
132. J.-J. Haus, Principes généraux du droit pénal belge, t. II, 3e
éd., p. 182, note nº 4.

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