L'IMPUTATION DES INFRACTIONS ENGENDRANT UNE PLURALITÉ DE VICTIMES 129 l'individu qui avait conscience de ce que le fait était concrètement à même de causer une pluralité de victimes paraît plus coupable de l'avoir commis ou de s'y être associé. Cette dernière précision permet en outre d'illustrer qu'exigée au titre des conditions de l'imputation, la condition de conscience peut être appréciée individuellement de sorte que le nombre d'infractions imputées est susceptible de varier lorsqu'auteur et complice n'ont pas eu identiquement la conscience de la pluralité de victimes concrètement potentielles. Du point de vue des conditions psychologiques d'imputation des infractions multiples, l'étendue de la responsabilité pénale du complice pourrait ainsi être indépendante de celle de l'auteur. Il en irait différemment s'agissant de la responsabilité pénale d'une personne morale. Le nombre des infractions pouvant lui être imputées est en effet susceptible de dépendre de la question de savoir si celui de ses organes ou représentants ayant commis le fait infractionnel présentait ou non la conscience qui pourrait ainsi être exigée. Conclusion du chapitre La prise en compte de la pluralité de victimes en droit pénal substantiel pourrait être opérée par un cumul d'infractions qui, une fois énumérées objectivement, supposerait par ailleurs d'être effectivement imputées, matériellement et psychologiquement. Les conditions matérielles de l'imputation des infractions multiples commises par un même fait sur plusieurs victimes semblent soulever des difficultés moindres. Une première complication peut néanmoins survenir dans les hypothèses où il importe de déterminer si la causalité entre les différents dommages et le fait unique est directe ou indirecte. Dans ce cas, il semble exclu que la personne qui a causé indirectement certains des dommages multiples puisse en être déclarée pénalement responsable si seule une faute simple lui est reprochée. Elle demeurera néanmoins responsable des dommages qu'elle a directement causés. Une seconde difficulté se présente dans les hypothèses de violences commises en groupe lorsqu'un ou plusieurs des participants à la bande violente n'aou n'ont pas exercé personnellement des actes violents sur l'ensemble des victimes du groupe. Si la théorie de la complicité co-respective peut en ce cas produire ses pleins effets, il en va en revanche différemment de la théorie de la scène unique de violences car elle reposerait alors sur une présomption invraisemblable de causalité. L'imputation de toutes les infractions commises par la bande violente à tous ses participants pourrait néanmoins être assurée par le recours à la théorie de la complicité qui permettrait d'imputer les violences exercées sur une ou plusieurs victimes du groupe à un ou plusieurs de ses membres qui ne les aurai(en)t pas lui-même commises. Les conditions matérielles de l'imputation des infractions multiples pouvant être énumérées objectivement sont donc assez peu sélectives. Il n'en est pas de même de ses conditions psychologiques. Celles-ci concrétisent en effet l'exigence particulière qui semble guider la théorie du concours idéal d'infractions et d'où il découle que le cumul d'infractions ne semble justifié que pour autant que la multiplicité des victimes atteste effectivement de la gravité subjective du fait commis et de la culpabilité plus grande de la personne qui peut en être déclarée pénalement responsable. Cette exigence serait alors suffisamment réalisée en conditionnant l'imputation des infractions multiples à la conscience de ce que le fait infractionnel était concrètement de nature à atteindre ou mettre en danger une pluralité de victimes. Elle sera a fortiori remplie