Systèmes - La conduite du changement climatique : entre contraintes et incitations - 1re - 58

La conduite du changement climatique

fait de la récession économique, plutôt aux alentours de 13 euros, ne
peut constituer, selon la commission Quinet, la seule référence sur les
calculs de long terme. D'ailleurs, ces deux dispositifs ne dépendent
pas des mêmes mécanismes institutionnels, puisque l'État a autorité
sur la fixation du taux de la taxe carbone, tandis que l'Union
européenne n'intervient pas sur le prix de marché des quotas mais
définit le plafond d'émissions à respecter par les installations
soumises. Il en résulterait nécessairement deux prix de référence du
CO2 au sein de l'économie française. La commission Rocard a tiré la
sonnette d'alarme au nom du principe d'égalité devant l'impôt. Selon
elle, avant l'introduction de la taxe carbone, il a existé une inégalité de
traitement entre les installations sous quotas européens, soumises à
une tarification du CO2, et les installations de plus faible puissance non
incluses dans le système européen53. Elle a donc mis en garde le
législateur fiscal contre l'introduction d'une nouvelle inégalité de
traitement, moins importante, mais vraisemblablement de sens
inverse, avec l'entrée en vigueur de la taxe carbone si le taux de cette
dernière diffère du prix de marché des quotas de CO2. En effet,
l'inégalité de traitement entre installations d'un même secteur
pourrait poser un problème de constitutionnalité car les différences
de traitement ne sont admises par la jurisprudence du Conseil
constitutionnel que lorsqu'elles trouvent leur fondement précis dans
la finalité d'une mesure54. Le Livre blanc précité a indiqué qu'« il
conviendrait de veiller à la cohérence entre les prix du CO2 liés à des
quotas ou une taxe »55. Comme l'a souligné le président de la
République, « qui comprendrait que les ménages et les PME soient
imposés sur une base deux fois plus élevé que celle des grandes
entreprises soumises aux quotas européens ? »56.
La tarification de la tonne de carbone à 17 euros va donc produire
un renchérissement très variable des divers produits énergétiques,
53. ROCARD M., Rapport de la conférence des experts et la table ronde sur la contribution climaténergie, op. cit., p. 27.
54. Le rapport Rocard propose ainsi l'introduction d'une taxe carbone différentielle pour les
installations sous quotas européens. Elle serait calculée de manière que la somme du
prix du quota - du moins sa valeur moyenne sur une période de référence - et de la
CCE différentielle atteigne le taux plein de la CCE. Selon le rapport Rocard, « cette
solution paraît techniquement praticable à mettre en place, et garantirait l'unicité du prix du
carbone au taux de la CCE tant que ce prix est supérieur au prix de marché des quotas ».
Cette hypothèse, si elle paraît vraisemblable, s'apparente à la situation qui a été mise
place en Norvège dans le secteur des hydrocarbures quand ce pays a rejoint le système
européen des quotas.
55. Cf. Livre blanc en vue de la Conférence d'experts sur la contribution climat-énergie,
juill. 2009, p. 12.
56. Discours de M. le président de la République, 10 sept. 2009, op. cit., p. 4.

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