Les Intégrales - Volume 19 - Le droit du crédit à la consommation - 1re - 193

Chapitre 2 - Le droit du crédit renouvelable

prononcer ainsi105. Les juridictions de Colmar106 et d'Aix-en-Provence107 ont pris l'habitude, quant à elles, de viser expressément l'avis étudié dans leurs motifs. Cette jurisprudence est donc favorable au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts dans un tel
cas.
452 Incertitudes. Toutefois, force est de constater que cette solution n'est pas encore
partagée par toutes les juridictions du fond. En effet, certaines continuent de déclarer
que le fait que « le déblocage, dans la limite du plafond autorisé, donne lieu à l'ouverture
d'un sous-compte avec une numérotation particulière pour chaque fraction de capital
mise à la disposition de l'emprunteur, et à l'émission d'un tableau d'amortissement ne
contrevient nullement aux règles qui gouvernent les crédits renouvelables par fraction ».
Il s'agirait alors « d'utilisation de fonds, dans le cadre d'une convention unique, comportant un plafond maximum autorisé, et utilisable au gré de l'emprunteur »108.

On peut penser, à la vue d'une telle divergence de jurisprudence, que la Haute juridiction
aura l'occasion d'intervenir, à nouveau, dans ce contentieux et de rappeler sa position en
reprenant les développements de l'avis du 6 avril 2018.
453 Incidences sur le contrat. Contre toute attente, l'avis étudié n'a eu, semble-t-il, aucune
incidence sur la convention concernée. En effet, nous sommes toujours en présence d'un
contrat qualifié de « crédit renouvelable », prenant la forme d'un crédit préconstitué dont
l'utilisation est fractionnée afin de permettre le financement d'opérations spécifiques, et
ce, sous des conditions de remboursement précises et individualisées en fonction de
l'affectation des fonds. Le délai de rétractation de 14 jours effectivement mentionné ne
concerne, quant à lui, que l'opération en son entier.

Ainsi, à aucun moment, les contrats successifs ne sont envisagés de façon autonome au
regard du droit qui leur est applicable : pas d'obligation préalable d'information ou
d'explication, pas d'analyse de la solvabilité, pas de remise d'une offre propre, etc.
La stratégie de la banque concernée suscite alors l'interrogation. Pourquoi ne pas avoir
cherché, au cours des deux dernières années, à mettre un terme à cette convention
hybride ou à la faire évoluer ? L'établissement espère peut-être que l'avis du 6 avril
2018, méconnu du grand public, sera oublié par les juristes. Objectivement, cet espoir
est vain lorsque l'on observe l'état de la jurisprudence actuelle des juges du fond.
POUR ALLER PLUS LOIN
* J. LASSERRE C APDEVILLE , Un prêt personnel ne saurait être qualifié par le prêteur
de crédit renouvelable. Retour sur un avis de la Cour de cassation remarqué :
Lexbase, Hebdo édition affaires, 12 nov. 2020, nº 654. - G. P OISSONNIER , Crédit
à la consommation : les modèles hybrides à la casse : D. 2018, p. 1266.

(105)
(106)
(107)
(108)

14 nov. 2019, nº 17/02133. - CA Douai, 21 nov. 2019, nº 17/03048. - CA Douai, 21 nov. 2019, nº 17/00133. -
CA Douai, 5 mars 2020, nº 17/02133. On notera que, dans un certain nombre de ces décisions, la cour d'appel
ordonne la réouverture des débats et invite les parties à faire valoir leurs observations sur le moyen relevé d'office
de la déchéance du droit de la banque aux intérêts.
CA Rennes, 11 janv. 2019, nº 15/07922. - CA Nancy, 24 janv. 2019, nº 18/00187. - CA Colmar, 3 juin 2019,
nº 18/00729.
CA Colmar, 24 sept. 2018, nº 17/02362. - CA Colmar, 23 sept. 2019, nº 18/02443. - CA Colmar, 7 oct. 2019,
nº 18/00636.
CA Aix-en-Provence, 29 nov. 2018, nº 17/15890. - CA Aix-en-Provence, 17 janv. 2019, nº 17/07908.
CA Paris, 23 mai 2019, nº 16/12133.

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