Fonction publique - Concours ENM 2024 - 7e - 49

C - SELON QUEL RÉGIME PROCÉDURAL L'AUDITION DES MIS EN CAUSE DOIT-ELLE ÊTRE
CONDUITE ? (2 POINTS)
Il existe désormais deux cadres juridiques d'audition d'un mis en cause. En effet, en plus de la garde à vue
(CPP, art. 62-2), la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 a créé le régime procédural de l'audition libre (CPP,
art. 61-1). Le critère conditionnant la mise en œuvre d'une d'audition libre ou d'une garde à vue consiste
dans l'existence d'une mesure de contrainte. Ainsi, conformément aux dispositions des articles 61-1 et 73
du Code de procédure pénale, le recours à l'audition libre, moins protecteur que celui de la garde à vue,
est exclu lorsque la personne a été conduite, sous la contrainte, par la force publique devant l'officier de
police judiciaire. À ce propos, la circulaire d'application du 23 mai 2014 précise qu'une personne doit être
considérée comme ayant subi une mesure de contrainte par les agents de la force publique lorsque ceux-ci
« l'ont contrainte à monter dans leur véhicule » ou « si elle a été menottée durant le trajet ». Cette position
correspond à celle de la Cour de Strasbourg qui a constaté une violation de l'article 5 de la Convention,
relatif au droit à la sûreté, dans une affaire où le requérant avait été entendu sous le régime de l'audition
libre alors qu'il avait été conduit au commissariat de police sous la contrainte (CEDH, 9 déc. 2021, Jarrand
c/ France, n° 56138/16).
En l'espèce, il résulte de l'énoncé que Messieurs P. et D. ont été menottés et conduits au commissariat,
de sorte que l'exercice d'une telle contrainte impose de recourir au cadre juridique de la garde à vue. En
outre, dans l'hypothèse où ces deux protagonistes seraient mineurs, il convient de rappeler que la chambre
criminelle a affirmé que « le mineur, conduit par les policiers auprès d'un officier de police judiciaire pour être
entendu sur une infraction qu'il [est] soupçonné d'avoir commise, se [trouve] nécessairement dans une situation
de contrainte et [doit] bénéficier des droits attachés au placement en garde à vue » (Cass. crim., 6 nov. 2013,
n° 13-84320).
Dans le cadre de cette mesure de garde à vue, il appartiendra à l'officier de police judiciaire d'informer
immédiatement le procureur de la République du recours à cette mesure et de notifier à Messieurs P. et
D., non seulement les faits qui leur sont reprochés, mais aussi les règles encadrant la durée de la mesure
- qui ne peut excéder vingt-quatre heures, voire quarante-huit heures sur autorisation du ministère public
- ainsi que les droits accordés par la loi, en particulier celui de bénéficier de l'intervention d'un avocat
et celui d'être examiné par un médecin. Dans l'hypothèse où ces deux protagonistes seraient mineurs, ils
peuvent également être placés en garde à vue, sous réserve d'être âgés d'au moins treize ans (CJPM, art.
L. 413-6 et s.). Outre les garanties prévues par le Code de procédure pénale, ces mineurs disposent du droit
de voir informer leurs représentants légaux de leur placement en garde à vue. De surcroît, ils bénéficient
obligatoirement de l'assistance d'un avocat et, s'il s'agit d'un mineur de moins de seize ans, d'un examen
médical. Par ailleurs, les auditions des mineurs placés en garde à vue font l'objet d'un enregistrement
audiovisuel.
II - Les qualifications (6 points)
Quelles infractions, voire quelles circonstances aggravantes, sont susceptibles d'être caractérisées ?
Afin de répondre de manière complète à cette question, il convient d'examiner, tour à tour, les faits commis
à l'encontre de Sami (A), ceux commis à l'encontre de Madame R. (B), ceux commis à l'encontre de l'agent
interpellateur (C) et ceux commis à l'encontre de Paul H. (D).
49
ANNALES CONCOURS 2023
Droit pénal
et procédure pénale

Fonction publique - Concours ENM 2024 - 7e

Table des matières de la publication Fonction publique - Concours ENM 2024 - 7e