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MÉMENTOS - INTRODUCTION HISTORIQUE AU DROIT
ses réformes. Cette pression de « l'opinion » s'inscrit parfois en temps de crise aiguë,
comme lors de l'ordonnance « cabochienne » imposée à Charles VI en 1413 : la fraction
pro-bourguignonne prend le contrôle de la capitale et arrache au roi ce texte qui
reprend les principes de la grande ordonnance de 1357 pour instaurer une monarchie
contrôlée ; la reprise de Paris par les Armagnacs met rapidement un terme à cette expérience
originale.
Cependant, l'extension du champ des interventions législatives royales ne va pas jusqu'à
remettre en cause leur exclusion traditionnelle des rapports de droit privé. Toutefois, la
nécessité de chasser les mauvaises coutumes et de réformer les usages fournit au roi un
instrument opportun pour intervenir dans la sphère du droit de la famille et des biens.
Dès le règne de Philippe Auguste,l'ordonnance royale de 1214 s'autorise à légiférer
dans le domaine des régimes matrimoniaux : le souci de l'ordre public et du bien
commun légitime l'objectif d'assurer aux veuves leur douaire, à savoir le droit de prélever
sur l'actif de succession de leur mari le nécessaire pour subsister. Pareillement, le roi use
de son pouvoir de créer des normes pour venir combler les lacunes des dispositions
coutumières successorales. En revanche, le principe selon lequel le droit privé doit être
régi par la coutume, confinant la législation royale au seul droit public, demeure
acquis ; le roi doit s'attacher avant tout à réformer l'administration générale du
royaume et de sa justice.
C- L'émergence d'un droit spécifique à la Couronne
Les premières lois fondamentales du royaume concernent, de façon significative, la
dévolution de la couronne, indisponible à la volonté royale. Ces règles coutumières,
non-écrites mais contraignantes, établissent l'hérédité, la primogéniture et la masculinité
tout en organisant les périodes de régence.
Sur le modèle de la distinction opérée par les canonistes entre la personne physique du
Pape et la personne morale, abstraite et pérenne, du Saint-Siège, les légistes utilisent la
distinction entre la couronne, symbole de la permanence de l'État, et le titulaire viager
du pouvoir royal. Fondement de la continuité de l'État, cette notion présente beaucoup
d'intérêt dans une période troublée où les guerres, les croisades, le risque de captivité,
les régences menacent d'affaiblir l'autorité royale en cas d'absence prolongée d'un
monarque incontesté. De telles situations surviennent fréquemment du règne de SaintLouis
à la fin de la guerre de Cent Ans.
Sur le plan juridique, ce transfert de compétences et de propriétés au profit de la
couronne réduit le roi au rôle de simple usufruitier et rompt avec les usages patrimoniaux
de droit privé. Dorénavant régis par un droit spécifique, le droit public, la dévolution
du pouvoir royal et la composition du domaine échappent progressivement à la
volonté du roi. À la faveur de crises et de contestations, des règles particulières se dégagent,
en réponse à des cas pratiques, sur la couronne comme sur le domaine.
1) La détermination des règles de dévolution de la couronne
L'élection d'Hugues Capet en 987 souligne la dépendance d'une royauté tributaire du
bon vouloir des grands. Afin de fonder durablement leur dynastie, les Capétiens vont
écarter la procédure élective au profit de l'hérédité au sein de leur famille. Pour se
libérer du consentement des barons et prendre des assurances pour leur succession en
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