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MÉMENTOS - INTRODUCTION HISTORIQUE AU DROIT
Mais les obstacles placés sur cette voie sont multiples : hostilité des Parlements qui manipulent
l'opinion, réticences des privilégiés de tous ordres et surtout manque d'interlocuteurs
crédibles en l'absence de convocation des états généraux du royaume depuis 1614.
La France à la veille de la Révolution demeure constituée d'un réseau de corps et de
communautés dotées de privilèges. Le pouvoir absolutiste rechigne à recourir à la procédure
formaliste d'élection de députés, très utilisée entre 1484 et 1614, quand la monarchie
contestée et affaiblie par la guerre de Cent Ans puis les guerres de religion était
contrainte de faire approuver ses décisions religieuses, politiques et fiscales. La voie la
plus souple consiste à convoquer une assemblée de notables, dont les délégués sont
nommés à discrétion. Le contrôleur général des finances Calonne réunit cette assemblée
à Versailles en février 1787.
Les débats dépassent vite la question fiscale pour évoquer la réforme de l'administration
territoriale et son articulation avec la désignation d'assemblées aptes à répartir la charge
fiscale. L'idée est de généraliser à tout le royaume les assemblées provinciales, privilège
des pays d'états tardivement annexés, provinces périphériques où l'intendant du roi est
tenu de se concerter avec les élites locales pour administrer le territoire, entreprendre de
grands travaux et répartir l'impôt. Le projet s'inspire du physiocratique Mémoire sur les
municipalités, rédigé par Dupont de Nemours à la demande de son ami Turgot.
L'architecture logique instituerait une pyramide d'assemblées à chaque niveau d'administration,
de la paroisse pour la gestion des biens communaux et l'entretien des
chemins vicinaux à la province pour les infrastructures, en passant par l'assemblée intermédiaire
d'élection ou de subdélégation pour la répartition de l'impôt. En plus de
l'intérêt de réintroduire de la représentation, le progrès consisterait à doubler le
nombre de députés du tiers état, mesure couplée avec le vote par tête et non plus par
ordre, faisant sauter le principal verrou de la réforme fiscale1
.
La cohérence de cette réorganisation administrative avec la réforme fiscale est grande et
prometteuse. L'objectif de justice est recherché à travers deux leviers : la diminution des
vieilles taxes indirectes lourdes et inintelligibles du fait de leurs extrêmes variations entre
provinces, et la création d'un impôt unique sur toutes les propriétés, nobles et roturières,
la « subvention territoriale » prônée depuis près d'un siècle depuis le Projet d'une dîme
royale de Vauban. Faire accepter cette table rase fiscale à une assemblée de notables
d'Ancien Régime relève de la gageure. Calonne renversé au printemps 1788, l'ancien
chef des opposants au projet, Loménie de Brienne, prend conscience à son tour de
l'ardente nécessité d'un impôt égalitaire, juste et efficace. Aussi Louis XVI doit-il se
résoudre à convoquer pour mai 1789 les premiers États généraux depuis 175 ans, depuis
la minorité de Louis XIII. La pré-Révolution signe déjà la fin de l'absolutisme, avec la
montée du rôle de l'opinion politique dans la prise de décision politique.
Après une enquête dans les archives puis en consultant le Parlement et l'assemblée des
notables, Louis XVI consent à ne pas retenir les modalités traditionnelles de réunion : le
contrôleur général Necker parvient à le convaincre de doubler la représentation du tiers
état, mesure encore éloignée de la proportionnalité démographique de chaque ordre.
Mais la question de la procédure de vote durant la réunion des États généraux n'est pas
tranchée, alors que le règlement de l'élection des délégués maintient des conditions
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1. Mergey A., L'État des physiocrates. Autorité et décentralisation, 2007, thèse droit Orléans.

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