Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 274

DROIT PÉNAL MÉDICAL
373 Peines principales et aggravées. - Le médecin condamné encourt en principe en tant
que violeur une peine de quinze ans de réclusion criminelle. Mais le Code pénal a
aménagé une multitude de circonstances aggravantes qui ont pour effet de porter la
peine encourue, selon les cas, à vingt ans, trente ans ou à la réclusion criminelle à perpétuité.
En droit pénal médical, parmi les quinze circonstances aggravantes du viol prévues
àl'article 222-24 du Code pénal et qui portent la réclusion criminelle encourue de
quinze à vingt ans, seules deux sont en pratique susceptibles de concerner le médecin
et retenues. Il s'agit tout d'abord du cas où le viol est commis sur une personne dont la
particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience
physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de l'auteur.
Cette circonstance aggravante est donc systématiquement retenue car, par hypothèse,
lorsque le médecin commet un acte de pénétration sexuelle dans l'exercice de sa profession,
il est confronté à une victime malade55
. On a même constaté qu'il utilisait cette
maladie ainsi que les défaillances physiques et psychiques qu'elle entraîne pour annihiler
les facultés de résistance de la victime et porter atteinte à la liberté sexuelle du patient.
Cette vulnérabilité du patient est ainsi un élément constitutif de la contrainte ou de la
surprise en même temps qu'elle constitue une circonstance aggravante, ce qui est peu
conforme à la stricte orthodoxie juridique56
.
La même critique peut être portée à l'égard de la seconde circonstance aggravante
susceptible de s'appliquer au médecin et qui concerne l'abus de fonction. Dans toutes
les hypothèses où le médecin est condamné pour viol dans l'exercice de son activité
professionnelle, c'est précisément sa qualité de médecin qui lui a permis de mettre en
confiance le malade pour parvenir à lui imposer la pénétration sexuelle. Là encore, le
fait que le praticien abuse de l'autorité, de la confiance et de l'aura qu'inspire sa profession
est utilisé pour nourrir l'exigence de contrainte ou de surprise des actes sexuels
imposés et comme circonstance aggravante57
. Quoi qu'il en soit, la quasi-totalité des
décisions jurisprudentielles qui se prononcent sur des viols de médecins retient ces
deux circonstances aggravantes. On ne trouve pas, en revanche, de décisions de condamnation
pénale publiées qui fasse état de viols de médecins aggravés en raison de la mort
de la victime ou du fait que le viol est précédé, accompagné ou suivi de tortures ou
d'actes de barbarie. Quant à la peine principale effectivement prononcée, elle reste bien
évidemment à la discrétion du jury qui prononce les peines et fixe leur régime en fonction
des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. L'indulgence ou la
sévérité sont donc permises, et l'on trouve en jurisprudence des traces de décisions de
condamnation particulièrement sévères à l'encontre de praticien, à l'instar de ce
médecin condamné à une peine de quinze ans de réclusion criminelle pour des actes de
pénétrations digitales, après injection de sédatif sur une patiente58
. Il est à noter enfin
que la loi nº 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles
et sexistes a créé un nouvel article 222-30-1 du Code pénal afin de sanctionner à titre
spécifique les hypothèses de soumission chimique permettant d'abuser d'une personne
à des fins sexuelles. Dorénavant donc, le législateur sanctionne à titre particulier le fait
pour un médecin d'administrer à un patient, à son insu, une substance de nature à
altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un
viol ou une agression sexuelle. Le délit est passible de cinq ans d'emprisonnement et de
75 000 euros d'amende et, lorsque les faits sont commis sur un mineur de quinze ans ou
une personne particulièrement vulnérable, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement
et à 100 000 euros d'amende.
(55) Par ex. Cass. crim., 18 sept. 2019, 16-83324 ; Cass. crim., 23 oct. 2013, nº 12-84431.
(56) V. supra nº 369.
(57) V. récemment à propos de la poursuite pour viol d'un médecin proctologue, Cass. crim., 20 août 2014, nº 1483752
; Cass. crim., 21 sept. 2011, nº 11-85098.
(58) Cass. crim., 15 mai 2013, nº 12-82692 ; également douze années de réclusion criminelle, Cass. crim., 18 sept.
2019, préc.
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