Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 44

L'OPPORTUNITÉ D'UNE SORTIE DES INFRACTIONS

service comporte des images ou représentations montrant la commission
de tels actes consistant en des atteintes volontaires à la vie » (art. 421-2-5-2).
L'objectif est désormais de sanctionner non seulement l'émetteur du
message mais aussi son récepteur : dès lors qu'il retourne sur un site où
des images d'exécution lui sont proposées à l'appui de propos provocateurs
ou apologétiques, il semble adhérer à ce propos et constituer une menace
pour la société indépendamment de toute autre action de sa part. Personne
ne s'est inquiété de voir ces textes intégrés au Code pénal plutôt qu'à la
loi de 1881. Ils sont pourtant intimement liés à l'exercice de la liberté de
communication6. Le texte incriminant la consultation de messages provocateurs ou apologétiques se montre même soucieux de ménager cette liberté :
un deuxième alinéa précise qu'il n'y a pas délit « lorsque la consultation
est effectuée de bonne foi, résulte de l'exercice normal d'une profession
ayant pour objet d'informer le public, intervient dans le cadre de recherches
scientifiques ou est réalisée afin de servir de preuve en justice ». Pour autant,
sa place dans le Code pénal semble parfaitement justifiée.
Il semble donc difficile de remettre en cause le mouvement général qui
s'est ainsi amorcé et qui tend à la consolidation d'un véritable droit du
terrorisme. Il y a une logique dans tout cela. Au fond, il paraît cohérent
d'incriminer à la suite les actes de terrorisme (articles 421-1 à 421-2-2) et
les différents comportements qui entretiennent un lien direct avec celuici. Il en allait déjà ainsi, depuis 2003, s'agissant de la non-justification
de ressources par un individu qui est en relation habituelle avec un ou
plusieurs terroristes (article 421-2-3) et, depuis 2012, s'agissant de l'incitation à participer à une association de malfaiteurs constituée en vue d'une
entreprise terroriste et de l'incitation à commettre les actes de terrorisme
des articles 421-1 et -2 (article 421-2-4). Au regard d'une telle évolution, la
réforme opérée le 13 novembre 2014 ne peut guère surprendre. En réalité,
l'incrimination du nouvel article 421-2-5 se contente d'élargir les termes de
l'incrimination précédente tout en divisant par deux les sanctions encourues : la provocation à des actes de terrorisme devient ainsi punissable sans
qu'il soit besoin d'établir (hypothèse où, en réalité, on ne peut établir)
que l'agent a adressé à une personne « des offres ou des promesses », lui a
proposé « des dons, présents ou avantages quelconques », l'a menacée ou
a exercé sur elle des pressions. Le législateur a clairement voulu distinguer
ces différentes formes de comportement. En les rapprochant (ce qui est
d'autant plus légitime que la provocation n'a plus à être publique), il a
rendu plus aisément compréhensibles ces nuances dans la répression. Le
seul reproche que l'on puisse lui adresser est peut-être de n'avoir pas été au
6. V., D écima O., « Terreur et métamorphose », D. 2016, p. 1828. R obert M.,
« Cybercriminalité : les nouvelles réponses législatives », AJ pén. 2016, p. 413.

Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ?

Table des matières de la publication Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ?