Hors collection - Droit de la « guerre atypique » - 77

Le contexte du droit de la guerre atypique
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exemple parce que ceux- ci sont conduits de manière non attribuable à un État.
Elles imposent également une autre prise en compte du temps, le temps de l'anticipation,
donc du renseignement et de l'analyse, mais aussi celui de la pensée des
nouvelles formes de guerre, l'entraînement et la formation y compris dans l'incertitude86
,
et le temps de l'après- guerre, « gagner la paix » par exemple par des actions
civilo- militaires. Or bien des étapes de cette dimension sont purement atypiques.
La deuxième de ces dimensions, celle des formes non- armées de guerre, est
encore moins discernable parce que toutes les formes atypiques de la guerre ne sont
pas usuellement connues, expérimentées, mises en œuvre par les entités militaires :
guerre informationnelle, guerre économique, lawfare, etc., ne serait- ce que parce
que ces éléments n'apparaissent dans les objectifs stratégiques des armées que
depuis peu et parce que, nous le verrons, la conception militaire de cette dimension
n'envisage qu'une partie de ces formes atypiques de guerre.
La troisième de ces dimensions identifie des types d'intensité des actions de
guerre et donc des effets de seuils : l'invasion de l'Ukraine par la Russie, par
exemple, en 2014 et 2022, ou du Koweït par l'Irak en 1990, par une armée sous
drapeau national, est une action d'agression armée caractérisée, attribuée et revendiquée.
À l'inverse, un certain nombre d'actions agressives, « opérations hybrides »,
« sous le seuil » ou en « zone grise » sont au contraire difficiles, voire impossibles
à traiter par les figures du droit international de la guerre, qui ne connaît que le
temps de guerre et le temps de paix. Les actions cyber, les campagnes de manipulations,
les opérations de déstabilisation diverses, doivent donc être saisies par
d'autres instruments juridiques, ceux de la guerre atypique (à supposer que les
instruments juridiques idoines soient présents et disponibles).
Le « droit de la guerre non militaire » n'est pas (encore ?) reconnu dans le
vocabulaire et la doctrine juridiques européens ou français. L'objectif n'est pas
ici d'envisager une théorie du droit de la guerre atypique qui aurait vocation à se
substituer à un ensemble de règles intéressant le droit du contentieux économique,
privé, public, interne ou international. Il s'agit de tenter de décrire cet ensemble
et en même temps d'en fixer les contours, même approximativement, et donc de
définir de manière globale les règles d'un tel droit de la guerre atypique du point de
vue des opérateurs privés ou publics, qu'elle soit conduite par un autre opérateur
privé et/ou par un organe étatique étranger, c'est- à-dire de présenter la situation
des entreprises placées dans un conflit mené avec des moyens extraordinaires, ceux
d'un État notamment, directement ou indirectement, pas nécessairement ennemi
86. B. Durieux, « Gagner la guerre avant la guerre, c'est d'abord préparer les chefs », in Les nouvelles
formes de guerre, op. cit., chap. 2.
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