Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 154 - Des gouvernements sous le regard de leur parlement - 355

CONCLUSION

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689.  Deuxièmement, l'intégration européenne a institutionnalisé, par le renforcement progressif du rôle des parlements nationaux dans la procédure communautaire, des organes ayant des agendas politiques et institutionnels différents. Il
n'est donc pas surprenant que lorsque les parlementaires nationaux s'emparent
de certains enjeux européens, la durée de la procédure d'adoption s'allonge
(cf. chapitre 1 du titre II). Un lien causal est, à n'en pas douter, difficile à établir et
il se peut que l'intervention parlementaire soit davantage la conséquence d'une
proposition normative européenne conflictuelle que la cause du rallongement de
la procédure d'adoption. Quoi qu'il en soit, la participation des parlements nationaux à l'élaboration des politiques européennes témoigne d'un degré élevé de
conflictualité de la procédure législative européenne.
690.  Enfin, bien que cela puisse sembler évident, les parlementaires nationaux disposent d'un mandat national. Avant d'être des acteurs européens, ils sont
des représentants nationaux. Ils représentent principalement les intérêts des
citoyens qui les ont élus et face auxquels ils sont responsables politiquement. En
ce sens, les débats parlementaires prennent des formes classiques de contestation
entre la majorité et l'opposition et n'intègrent que de manière contingente les
intérêts des autres États et de l'Union européenne dans son ensemble. Les débats
qui se sont déroulés en 2011 au sein du parlement italien et du parlement français
concernant la réforme de la gouvernance Schengen offrent une très bonne illustration de ce phénomène (cf. chapitre 1 du titre IV). Le compromis entre la majorité parlementaire de centre droit et l'opposition de gauche en France demande le
maintien au niveau national de la compétence de réintroduction des contrôles aux
frontières internes à l'Union européenne. À l'inverse, le compromis entre la coalition majoritaire de droite et l'opposition de gauche en Italie plaide pour un
-transfert de cette compétence à l'Union européenne. Or, la victoire des uns est
nécessairement la défaite des autres. Dans la mesure où les compétences de réintroduction des contrôles aux frontières internes à l'Union européenne n'ont pas
été européanisées, les parlementaires italiens n'ont pas réussi à défendre les intérêts des citoyens italiens, tels que les parlementaires les appréhendaient.
691.  Mais cette logique de défense des intérêts nationaux peut avoir dans
certains cas des conséquences négatives sur la protection des droits fondamentaux. Comme l'examen des Accords PNR avec les États-Unis à la Chambre des
communes l'a montré, les parlementaires nationaux ont légitimé la défense des
intérêts diplomatiques de la Grande-Bretagne au détriment de la protection des
droits fondamentaux. Pour reprendre les propos de Charles Pasqua, la démocratie s'arrête là où commence l'intérêt de l'État.  On peut alors affirmer que la
-protection des droits fondamentaux par les parlements nationaux s'arrête là où
commence l'intérêt de l'État.

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