Cours - Droit pénal des affaires - 3e - 241

Introduction : l'évolution du droit pénal des affaires
autonomie du droit pénal des affaires, elle doit être nuancée. En effet, l'autonomie d'un droit n'est
pas nécessairement totale ou absolue. Certes, il peut exister un ensemble de règles qui s'appliquent
spécialement au droit concerné et qui participent à son originalité en dérogeant au droit
commun. Néanmoins, à défaut de dispositions spécifiques, ce sont les normes de droit commun
qui doivent être utilisées, ces dernières se caractérisant à la fois par « une très grande stabilité
et par une application très générale »6
.
Le droit contient de nombreux exemples dans lesquels les lois spéciales contaminent le droit
commun, voire s'y substituent pour créer un droit autonome. En ce sens, le droit pénal des
mineurs illustre de manière significative l'usagedela notion d'autonomie en droit. En effet, le principe
de l'autonomie du droit pénal des mineurs est aujourd'hui acquis et majoritairement approuvé7
.
La réforme du droit pénal des mineurs abonde d'ailleurs dans cette direction, notamment par la
création d'un code dédiéà la justicepénaledes mineurs8
mineurs forme un « système juridique original »9
. Néanmoins, si le droit pénal des
,il n'est pas totalement autonome. Il est effectivement
possible de constater que « tout le droit applicable au mineur n'est pas, ipso facto, original »10
et qu'il demeure, dans une large mesure, soumis au droit commun11
. Par conséquent, un droit peut
être autonome sans pour autant s'émanciper totalement du droit commun. Plus précisément, un
droit est autonome principalement au regard des règles qui le régissent et des finalités qu'il poursuit.
Le droit qui est régi par un corpus de règles particulières, se détachant du droit commun, et
qui poursuit une ou plusieurs finalités qui lui sont spécifiques, est un droit autonome. En outre, un
droit peut être considéré comme étant autonome lorsque des juridictions spécialisées sont sollicitées
et que des procédures particulières s'appliquent devant elles. Le droit autonome forme alors
un système juridique original ou « indépendant », pour reprendre le terme employé par Raymond
Gassin, que cette autonomie soit totale ou simplement partielle.
La définition de l'autonomie d'un droit ainsi entendue permet de préciser la méthode à adopter afin
d'apprécier si le droit pénal des affaires est un droit autonome. Le droit pénal des affaires pourra
être considéré comme un droit autonome s'il se détache des autres branches du droit et s'il
constitue un « système juridique original et indépendant » doté de règles particulières et dérogatoires
au droit commun. Une fois l'existencedel'autonomie du droit pénal des affaires établie, il
sera possible d'évaluer son intensité, selon qu'il s'émancipe totalement ou simplement partiellement
des autres droits auxquels il est souvent rattaché, tels que le droit pénal économique, le droit pénal
de la consommation ou encore le droit pénal spécial.
6. Ibid.,nº 7.
7. En ce sens, v. notamment Ph. BONFILS et A. GOUTTENOIRE, Droit des mineurs,coll. Précis,2e
éd., éd. Dalloz, 2014, nº 1352 et s., p. 833 et s. Une autonomie
substantielle et une autonomie procédurale du droit pénal des mineurs furent également consacrées par le Conseil constitutionnel dans
sa décision du 29 août 2002 (Cons. const., 29 août 2002, nº 2002-461 DC, Loi d'orientation et de programmation pour la justice, JORF du
10 sept. 2002, p. 14953 ; Gaz. Pal.,5 sept.2002,nº 248, p. 3,note J. -É. SCHOETTI).
8. Ordonnance nº 2019-950 du 11 sept. 2019 portant partie législative du Code de la justice pénale des mineurs (JORF nº 0213 du 13 sept. 2019,
texte nº 2) ratifiée par la loi nº 2021-218 du 26 févr. 2021 (JORF nº 0050 du 27 févr. 2021, texte nº 1). Pour quelques commentaires des grandes
lignes de la réforme du droit pénal des mineurs : Ph. BONFILS, « Première approche du code de la justice pénale des mineurs », AJpénal 2019,
p. 476 ; du même auteur, « Ratification de l'ordonnance portant création de la partie législative du Code de la justice pénale des mineurs »,
JCPG2021, étude 391 ; E. GALLARDO, « Les grands axes de la réforme du droit pénal des mineurs », JCPG 2019, étude 1132 ; J.-L. RONGÉ, « Enfance
délinquante : de l'ordonnance de 1945 à l'ordonnance de 2019 », Dr. pén. 2019, étude 27 ; J.-P. ROSENCZVEIG, « Juge des enfants, juge partial ? »,
Dr. pén. 2019, entretien 6 ; W. ROUMIER, « Instauration d'un Code de la justice pénale des mineurs », Dr. pén. 2019, alerte 49.
9. Ph. BONFILS et A. GOUTTENOIRE, Droit des mineurs, op. cit., nº 1353, p. 834.
10. Ibid.
11. Par exemple, pour que la responsabilité pénale du mineur soit engagée, il faut, comme pour les majeurs, que l'infraction soit constituée en
tous ses éléments, tant matériel que moral. De plus, comme pour le droit pénal des majeurs, le droit pénal des mineurs repose également sur
le principe de légalité criminelle (B. de LAMY, « Droit pénal des mineurs : une spécificité toujours limitée », note sous Cons. const., 10mars 2011,
nº 2011-625 DC et Cons. const., 8juill. 2011, nº 2011-147 QPC, RSC 2012, p. 227).
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