Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance - 78

L'ENVIRONNEMENT

conçu s'inscrit donc dans une logique de responsabilité sociale de l'entreprise, où prime la transparence des acteurs, puisque c'est à l'entreprise de
mettre en place ce plan de vigilance, de le publier et d'en rendre compte76.
Abandonnant toute idée de mécanisme original de responsabilité77, ce
dispositif ne vise pas tant à accroître la solidarité des opérateurs de la
chaîne de sous-traitance qu'à garantir une intériorisation de la démarche
de prévention par le donneur d'ordre.
Pour décevante qu'elle puisse être, cette proposition pourrait cependant
marquer une avancée en faveur d'un autre modèle économique s'appuyant
sur une forme de « jeu coopératif » où États comme entreprises pourraient
trouver un intérêt économique réciproque à l'amélioration des conditions
de travail des travailleurs78. En matière de santé et de sécurité, les progrès
réalisés sont liés au cadre économique dans lequel le travail en sous-traitance
prend place79.

B. L'écueil du modèle économique
La responsabilisation des acteurs de la chaîne de sous-traitance se traduit
par la multiplication des normes de comportement destinées à encadrer
les pratiques, trouvant leur source dans des procédés divers et relevant
d'une juridicité variable. Sans revenir sur les instruments traditionnels de la
démarche de responsabilité sociale de l'entreprise (codes de bonne conduite,
audit, reporting)80, il est possible de s'interroger sur leur effectivité quant
à la garantie des droits des travailleurs des entreprises enserrées au sein
des réseaux internationaux de sous-traitance. En dépit de ces instruments,
76. Sur la crainte d'un devoir de vigilance se bornant à une « obligation de reporting
améliorée », S. Cossart et M.-L. Guislain « Le devoir de vigilance pour les entreprises
multinationales, un impératif juridique pour une économie durable », RLDA 2015, p. 77.
77. Voir pour un autre mécanisme de responsabilité possible, empruntant au mécanisme de solidarité financière en matière de lutte contre le travail illégal, C. Hannoun,
« Proposition pour un devoir de vigilance des sociétés mères », in Mélanges en l'honneur
du professeur Michel Germain, LGDJ, 2015, p. 381.
78. Voir la démonstration de O. Favereau, « Le devoir de vigilance dans les groupes
et réseaux de sociétés. Sur la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le
30 mars 2015 », RDT 2015, p. 447.
79. La prédominance des préoccupations liées à l'attractivité et à la compétitivité des
entreprises dans les débats relatifs à la responsabilité des donneurs d'ordre en matière de
sécurité des travailleurs en est une illustration. En témoigne le rejet, sans grande surprise,
par le Sénat le 18 nov. 2015 de la proposition de loi et la teneur des discussions (JORF,
compte rendu intégral de la séance du18 nov. 2015, p. 11043).
80. Sur ces instruments voir la thèse de M. Caillet, Le droit à l'épreuve de la responsabilité sociétale des entreprises : étude à partir des entreprises transnationales, université
de Bordeaux, 2014.

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