En poche - Histoire des idées politiques - 2e - 39

Par exemple, Philippe Buchez (1796-1865) propose un socialisme
faisant le syncrétisme entre christianisme, Révolution et socialisme.
Co-fondateur de la Charbonnerie, converti au catholicisme, il est le
théoricien du socialisme chrétien en vertu duquel « la Révolution française
est la conséquence la plus avancée de la civilisation ; la civilisation
moderne est sortie tout entière de l'Évangile » (J. Touchard).
Comme d'autres, il promeut le système associatif et la fraternité.
Louis Blanc (1811-1882) propose lui une nouvelle organisation du
travail. Luttant contre le capitalisme individualiste, il propose la mise
en place « d'ateliers sociaux » gérés par l'État (ce qui sera dénoncé
par Proudhon). Réformateur et non révolutionnaire, il prévoit que la
productivité de ces ateliers conduise peu à peu les entreprises privées
à se transformer. Républicain, il parvient au sein de la « Commission
du Luxembourg » à mettre en œuvre ses ateliers. Bien vite cependant,
ses collègues modérés dénaturent et vident de sa substance l'idéal de
Blanc. Leur suppression conduit à de violentes émeutes qui participeront
à l'arrivée au pouvoir de Louis-Napoléon Bonaparte.
LE SOCIALISME INSURRECTIONNEL : BLANQUI
ET PROUDHON
Surnommé « l'enfermé » pour le temps qu'il a passé dans les prisons
des différents régimes, Louis-Auguste Blanqui (1805-1881) est
connu pour défendre une révolution permanente. Il ne propose pas de
doctrine à proprement parler, mais se place dans la lignée des hébertistes
et de Babeuf. Il critique le socialisme utopique et milite pour une
dictature populaire transitoire.
Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) propose quant à lui une véritable
doctrine. Souvent difficile à classer sur l'échiquier politique, repris
par l'extrême-droite car antisémite comme par l'extrême-gauche,
adepte des revirements et auteur d'une bibliographie aussi foisonnante
que circonstanciée, Proudhon se fait le champion de la liberté
contre toute forme d'entrave. Inspirateur de Marx et théoricien de
l'anarchisme français, la portée de son œuvre est considérable. Ainsi,
il critique tant le modèle capitaliste que la lourdeur de l'État, véritables
remparts à la liberté individuelle. Il dénonce également toute forme
de propriété autre que celle issue de son travail propre (« la propriété
c'est le vol ») et la démocratie rousseauiste.
À ces constats, il oppose la vision d'une société reposant sur la famille,
et particulièrement sur le pater familias. Reprenant les idées de
1789, il appelle à l'égalité et à la liberté individuelle, à la justice et à
une philosophie traditionnelle - d'un point de vue moral, mais aussi
par son rapport au rural. Pour ce faire, Proudhon mise d'abord sur le
« mutuellisme », c'est-à-dire le recours aux échanges mutuels. Quant
à la suppression de l'État, elle doit laisser place à un fédéralisme universel
de familles et de communes libres.
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