Droits africains - L'avocat dans l'espace Ohada - 1re - 46

46 L'AVOCAT DANS L'ESPACE OHADA

l'Ordre des avocats s'appuient sur des dispositions législatives ou réglementaires internes aux pays concernés72.
Toutefois, de telles dispositions ne seraient-elles pas contraires à l'esprit du
règlement communautaire ? Ce dernier ne peut, en effet, à la fois offrir aux
professeurs agrégés des facultés de droit une voie exceptionnelle d'accès à
la profession d'avocat et leur prescrire de renoncer au préalable à cette
qualité. Une telle démarche, si elle devait être la règle, viendrait en contrariété du caractère « universel » (reconnu tout au moins dans une communauté UEMOA dans la mesure où la nationalité n'est plus déterminante
pour l'exercice de la profession au regard du règlement nº 5) d'une profession d'avocat, par nature ouverte et libérale, bien aux antipodes de toutes
idées de restrictions. En plus, elle serait en deçà de l'évolution du monde et
des regroupements sous régionaux, régionaux et continental (ZLECA) des
acteurs économiques déterminés par le profit et la qualité de la prestation
de service fournie par le prestataire dont ils sollicitent plus le professionnalisme que le titre ou la qualité. À la limite, le renforcement des règles de
conflits se comprendrait d'autant plus que les avocats, par ailleurs professeur de droit, pourraient s'abstenir de prendre des dossiers contre l'État
et les collectivités publiques.
Le règlement, spécifiquement ses dispositions relatives aux incompatibilités, est actuellement au cœur d'une bataille des interprétations entre la

72. Arrêt du 8 juill. 2020, Recours-de-la-Commission-contre-Décision-de-la-Cour-constitutionnelledu-Bénin, la CJ-UEMOA, suite à une requête de la Commission contre la décision numéro 19287 du 22 août 2019 de la Cour constitutionnelle du Bénin, aux fins de la mise en œuvre de
l'article 14 du protocole additionnel numéro 1 relatif aux organes de contrôle de l'UEMOA.
Pour les juges de la Cour de justice de l'UEMOA, la Cour constitutionnelle du Bénin a
méconnu le droit communautaire en ce qui concerne l'exercice de la profession d'avocat
dans l'espace UEMOA. Le dispositif de l'arrêt indique : « Que la Cour constitutionnelle du
Bénin, instance statuant en dernier ressort, avait l'obligation de saisir la Cour de Justice de
L'UEMOA par le biais du recours préjudiciel, pour toute interprétation des normes communautaires ; Que l'interprétation faite par ladite Cour du sens et de la portée des dispositions
de l'article 35 du règlement est erronée et doit être corrigée conformément à l'article 14 du
Protocole numéro 1 susvisé ; Que l'article 35 pose un principe de compatibilité entre l'accès à
l'exercice de la profession d'avocat et la fonction d'enseignant vacataire, compris comme une
catégorie professionnelle dont le régime et le statut sont juridiquement conciliables avec la
profession d'avocat. Que l'ordre juridique de l'Union prime dans son intégralité sur les
ordres juridiques nationaux, quelle que soit leur nature, leur domaine d'intervention et
leur niveau d'application dans le temps ; Que de ce fait, aucune disposition juridique administrative, législative, juridictionnelle et même de niveau Constitutionnel interne ne saurait
être utilisée, pour mettre en échec le droit communautaire ; Qu'il appartient aux juridictions
des États membres, et en particulier aux Cour suprême et Constitutionnelle du Bénin, de
s'approprier les articulations du présent arrêt et de s'y conformer avec diligence, étant
entendu que les interprétations faites des dispositions du règlement communautaire s'imposent à toutes les autorités administratives et juridictionnelles des États membres de l'Union
conformément à l'article 14 du Protocole numéro 1 susvisé ».
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