Bibliothèque de droit privé - Tome 604 - L'impartialité de l'arbitre - 69

L'impartialité de l'arbitre évaluée à partir de ses actes

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professionnel, conjugué à une envie d'accepter la mission d'arbitre et d'éviter une
disqualification précautionneuse de la part de l'institution d'arbitrage, peut donc
pousser l'arbitre à limiter la quantité des informations révélées même si l'attitude
idéale dans cette hypothèse semble être le refus de nomination (ou la démission)24.
En tout cas, l'absence de critères clairs pour la révélation25 génère une incertitude
sur l'étendue de celle-ci, ce qui laisse la porte ouverte devant les différentes
conceptions des arbitres de ce que la révélation (et accessoirement l'impartialité,
la transparence, la vie privée, etc.) devrait être.
B. CONSÉQUENCES : LA DIFFICULTÉ DE CARACTÉRISER
LE RISQUE DE PARTIALITÉ À PARTIR DU MANQUEMENT
À L'OBLIGATION DE RÉVÉLATION
52.  De ce qui précède, il est clair que différentes raisons influencent l'exécution par l'arbitre de l'obligation de révélation et il serait simpliste de réduire une
mauvaise exécution de cette obligation à un comportement manifestant la partialité de l'arbitre. La non-révélation, qui n'est qu'un silence ou une omission, est par
nature plus équivoque qu'une parole ou une action.
Comme il vient d'être rappelé26, le standard de révélation est plus large que le
standard d'appréciation de l'impartialité. Par conséquent, un arbitre doit révéler
certaines circonstances qui ne mettent pas en cause son impartialité et qui ne
peuvent justifier sa récusation27. A priori, il n'y a aucune raison qui rendrait ces
circonstances plus dangereuses sur l'état d'esprit de l'arbitre si elles ne sont pas
révélées. Même une omission délibérée, motivée par la volonté d'être nommé
arbitre ne serait-ce que pour des raisons matérielles (argent ou prestige), ne signifie pas que l'arbitre est partial.
53.  Ces observations, soulignant l'équivocité du manquement à l'obligation
de révélation, n'ont pas pour objectif de condamner le point de vue selon lequel
ce manquement doit être sanctionné par la même sanction du risque de partialité
(récusation de l'arbitre ou refus d'efficacité de la sentence)28. Le but de ces observations est, en revanche, d'insister sur le fait qu'en pratique ce manquement ne
trouve pas nécessairement sa raison dans la partialité de l'arbitre, car les raisons
de ce manquement sont diverses et peuvent n'avoir aucun lien avec la question de
l'impartialité de l'arbitre. De cette constatation factuelle, nous pouvons déduire
qu'il semble excessif de présumer de manière irréfragable que la non-révélation
d'une circonstance équivaut à un risque de partialité29.
24. D'ailleurs, le commentaire de l'article  4, d) des lignes directrices de l'IBA précise que si
l'arbitre estime que des règles de confidentialité ou d'autres règles qui s'imposent à lui l'empêchent de
révéler des faits ou circonstances qui devraient l'être, il doit refuser sa nomination ou démissionner.
25. À l'exception notable des lignes directrices de l'IBA qui n'ont pas force de loi et qui, par
ailleurs, ne résolvent pas toutes les questions pouvant se poser en pratique.
26. V. supra n° 50.
27. D'ailleurs, le fait de se soumettre à l'obligation de révélation signifie que l'arbitre estime a
priori être impartial, sinon il aurait refusé sa nomination ou aurait démissionné.
28. En effet, une telle sanction pourrait s'expliquer par des considérations de politique (législative
ou jurisprudentielle) visant, par exemple, à augmenter la transparence de l'arbitrage et à en
responsabiliser les arbitres.
29. Par conséquent, si nous tenons à sanctionner tout manquement à l'obligation de révélation, il
semble nécessaire de trouver un fondement théorique autre que la sanction de la partialité. Autrement dit,
l'obligation de révélation pourrait être déconnectée de l'obligation d'impartialité pour qu'il en soit fait une
obligation (éventuellement de résultat) distincte de l'arbitre qui pourrait, en cas de manquement à cette

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