Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 305

LES SOURCES FORMELLES DU DROIT PRIVÉ POSITIF ET LEUR INTERPRÉTATION

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individuelles632. En face d'une loi, laissant place au libre jeu de l'autonomie privée,
les usages conventionnels, fussent-ils tacitement acceptés, et même en des affaires
purement civiles, à plus forte raison en matière commerciale, tiendraient en échec
les dispositions du législateur633. C'est ce que la jurisprudence, tant française634
qu'allemande635, a parfois oublié. Et, si l'on peut expliquer ses décisions par le
désir de maintenir aussi complètes que possible l'unité de législation et l'uniformité dans le règlement des affaires, il est permis de voir là un souci exagéré d'homogénéité juridique ; et, en tout cas, il ne me paraît guère contestable que, bien
que défendue par des auteurs considérables636, cette doctrine méconnaisse la
nature exacte des choses637.
4° S'il est possible de soutenir, sauf à discuter plus tard (n° 179) le mérite de
cette opinion, que la méconnaissance, d'une coutume, par les juges du fond,
puisse, comme constituant une violation du droit objectif, donner prise à la censure de la Cour de cassation, à tout le moins, semble-t-il, ceux, qui n'admettent
plus la cassation pour atteinte à la loi du contrat638, devraient, a priori, écarter le
contrôle suprême, au cas de violation prétendue d'un usage conventionnel639, à
632. [Comp. Civ. cass., 15 juin 1900, Sir. 1900-1-526 : « usages des Compagnies de chemin de fer
elles-mêmes ».] - J'ai à peine besoin de dire que, pas plus que la coutume proprement dite, les usages
conventionnels ne peuvent être admis, à l'encontre d'un principe d'intérêt social supérieur. Voy.
Goldschmidt, Handbuch des Handelsrechts, § 35, texte et note 33, t. I2, p. 337.
633. L. Goldschmidt, op. cit., t. I2, p. 337, initio, et p. 363. - C. Crome, Allgemeiner Theil der
modernen französischen Privatrechtswissenschaft, 1892, p. 38. - Douai, 22 mars 1886, Sir. 88, 2, 147,
et, sur cet arrêt : Huc, Commentaire théorique et pratique du Code civil, t. I, 1892, n° 49, in fine,
p. 58-59. [- Voy. la réserve d'E. R. Bierling, op. et loc. citt., 3. - E. Thaller, Traité élémentaire de
droit commercial, Paris, A. Rousseau, 5e éd., 1916, n° 50, p. 44-45.]
634. Voy., notamment, Civ. cass., 26 mai 1868, Sir. 69-1-33 : « ... attendu que, si les usages du
commerce peuvent être invoqués dans le silence, de la loi ou de la convention, ils ne peuvent autoriser
le juge à méconnaître les effets, que la loi attache à une convention dûment constatée ». - Req. rej.,
30 décembre 1879, Sir. 80-1-199. [- Adde Req. rej., 29 mai 1902, D. P. 1902-1-343, imparfaitement
motivé.] - On ne peut qu'approuver, au contraire, la décision de Req. rej., 8 janvier 1894,
Sir. 95-1-174, qui fait prédominer la convention expresse des parties sur les usages conventionnels.
635. Voy. les décisions analysées par P. Laband, dans Zeitschrift für das gesammte Handelsrecht,
1873, t. XVII, p. 488-489.
636. Voy., notamment, pour la France : Larombière, Théorie et Pratique des obligations, 2e éd.,
1885, sur l'art. 1135, n° 3, t. I, p. 384-385, et sur l'art. 1160, n° 3, t. II, p. 120. - Lyon-Caen et
Renault, Traité de droit commercial, n° 82, t. I3, 1898, p. 83, note 2. - Cpr. Massé, Le droit commercial dans ses rapports avec le droit des gens et le droit civil, t. I3, 1874, qui, après avoir reproduit la
solution de l'arrêt de 1868 (p. 72, texte et note 2), ajoute (p. 73-74) des considérations tendant à en
critiquer la doctrine. - En Allemagne, la même opinion avait été présentée aussi, pour un cas particulier, du moins, par Goldschmidt, dans la première édition de son Handbuch des Handelsrechts
(1864-1868), en un passage rapporté et critiqué par Laband, loc. cit., p. 489-490. Dans sa seconde
édition, Goldschmidt, § 35, note 29 b, t. I, p. 335, a tenu compte de la critique de Laband. Adde § 36,
in fine, texte et notes 20-21, t. I2, p. 363.
637. Comp. Demolombe, Cours de Code civil, t. XXV, n° 19 bis. - Adde : Civ. rej., 5 décembre
1842, Sir. 43, 1, 89. - Req. rej., 1er décembre 1875, D. P. 77-1-45. - Douai, 22 mars 1886, Sir. 88, 2,
147. - Laband, dans Zeitschrift für das gesammte Handelsrecht, 1873, t. XVII, p. 487-495. -
Goldschmidt, Handbuch des Handelsrechts, t. I2, p. 335, p. 363.
638.Suivant la doctrine, qui prévaut depuis l'arrêt des Ch. réunies, rej., 2 février 1808, Sirey, chron.,
et qui n'a pas été détruite par les tempéraments, que la jurisprudence postérieure y a apportés (Voy.
encore : Civ. cass., 23 février 1892, Pand. franç. 93-1-100. - Civ. cass., 29 novembre 1892, Sir. 93, 1,
70. - Civ. cass., 17 juin 1896. Sir. 98, 1, 438) : en ce sens, du moins, qu'il reste acquis, que les juges du fait
fixent, souverainement, le contenu matériel des contrats (ou plus généralement des actes juridiques), qui
leur sont soumis. Cpr. J. Charmont, dans Revue critique de législation et de jurisprudence, 1894, p. 74-79.
639. Sic : Demolombe, t. XXV, n° 19. Cpr. t. I, nos 33 et 35, in fine. - Larombière, Théorie et
pratique des obligations, 2e éd., 1885, sur l'art. 1160, n° 4, t. II, p. 120. - Baudry-Lacantinerie et
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