Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 54

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MÉTHODE D'INTERPRÉTATION ET SOURCES EN DROIT PRIVÉ POSITIF

telle que la possession, s'ils recueillaient tous les droits quelconques du défunt,
même ceux ayant un caractère strictement personnel (actions en désaveu de
paternité, en contestation de reconnaissance d'enfant naturel, en répression de.
diffamation envers le défunt... etc., etc.), s'ils étaient tenus de ses dettes intra
vires ou ultra vires hereditatis, indépendamment de tout bénéfice spécial, on fut
loin de trouver dans la loi réponse suffisante à toutes ces questions. - Mais, se
servant des éléments épars fournis par les textes, y ajoutant quelques idées équitables ou pratiques, que l'on crut pouvoir prêter au législateur, on élabora toute
une conception, fondée sur la représentation par les héritiers de la personne du
défunt, qui se manifestait, pour les uns, par la qualité d'héritier légitime, pour les
autres, par la saisine héréditaire, pour d'autres encore, par la condition d'héritier
du sang, pour quelques-uns même, par celle de successeur universel ou à titre
universel. D'où, suivant le principe dégagé de la loi, la variété des conséquences
dans l'application14.
Veut-on, enfin, un exemple tiré de théories moins vastes et moins complexes ?
Je l'emprunte à la récente jurisprudence. La question s'est posée de savoir, dans
quelle mesure le propriétaire d'une chose inanimée était responsable du dommage
causé par le fait de sa chose, responsabilité qui, pour certains cas du moins, paraît
prévue par l'art. 1384, al. 1, in fine, C. civ. franç. L'interprétation proprement dite
de ce texte, qui ne fait que poser une règle très générale, ne pouvait suffire à élucider les nombreux détails, que soulève son application, dans l'état actuel de l'industrie. Et notamment, il fallait savoir si le propriétaire était responsable, comme
tel, et dans quelles conditions, si la circonstance, accessoire, d'un contrat, où fût
intervenue la victime du dommage, ne modifiait pas cette responsabilité, si, du
moins, une clause particulière ne pouvait pas l'exclure, enfin quelle preuve devait
ou pouvait être faite, soit pour mettre en jeu la responsabilité, soit pour l'écarter.
- Ayant à trancher ces diverses questions, il ne me semble pas que la jurisprudence de nos tribunaux se soit placée sous le joug d'une théorie préconçue. Non
sans raison peut-être, les arrêts ont résolu les diverses faces du problème général,
qui se proposaient à leur examen, en les envisageant distinctement, et sans les
croire a priori dominées toutes par une conception unique et homogène15. Mais,
en cela, il en faut convenir, notre jurisprudence pratique a fait faux bond à la
méthode traditionnelle. - Aussi, tout autre a été le procédé de la doctrine. Par
l'organe de ses divers représentants, elle a proposé un certain nombre d'idées
générales, tendant toutes, sous la variété de leurs aspects, à ramener la responsabilité en question à un principe unique. Ce principe a été, pour ceux-ci, la faute
délictuelle ou quasi délictuelle, pour ceux-là, la faute contractuelle, susceptible
elle-même de plusieurs aspects, pour quelques-uns, l'effet même et comme la rançon de la propriété, - tout cela fondu et combiné, à doses variables, avec des
présomptions de faute plus ou moins intenses, - mais avec la préoccupation
visible, chez chaque inventeur ou prôneur de système, de dégager, par voie de
14. Cons. Ed. Lambert, De l'Exhérédation et des legs au profit d'héritiers présomptifs, Paris, 1895,
§§ 164-214, p. 130-167. - Et, comp., sur le caractère artificiel de la conception, à laquelle je fais allusion ici : E. I. Bekker, Ernst und Scherz über unsere Wissenschaft, 1892, p. 70.
15. C'est en partant de cette idée, qu'il faudrait, je crois, chercher à expliquer l'arrêt de rejet de
la Chambre Civile du 16 juin 1896 et celui de la Chambre des Requêtes du 30 mars 1897 (D. P., 97, 1,
433). - Sur ces deux arrêts, voy. J. Charmont, dans : Revue critique de législation et de jurisprudence,
1898, p. 129-136.
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