Manuel - Introduction au droit européen - 3e - 68

INTRODUCTION AU DROIT EUROPÉEN
Unis. Or, dans ce contexte idéologique, qui est aussi celui de la victoire du
camp capitaliste, les Communautés (auxquelles a succédé l'Union) ont fini
par renoncer à leur politique vis-à-vis des États de l'AELE, avec la mise en
place en 1992 de l'Espace économique européen (EEE) qui est une zone de
libre-échange (avec cependant de grandes originalités institutionnelles) entre
les Communautés, puis l'Union, et les États membres de l'AELE, à l'exception
de la Suisse qui, suite à un référendum défavorable, a refusé de rejoindre
l'EEE- les 27 États membres de l'Union sont donc désormais en libreéchange
avec la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein au sein de l'EEE.
S'il est donc vrai que des années 1950 à la chute du bloc de l'Est (et la
conclusion du traité de Maastricht), l'intégration a été le modèle novateur
recherché par la construction économique européenne, un mouvement nouveau
favorable au libre-échangisme classique a pris le pas depuis. Replacé
dans ce contexte, le Brexit prend une signification différente, et montre qu'il
est impossible de croire que le développement du libre-échangisme « extérieur
» n'influence pas l'intégration européenne (communautaire) à l'intérieur,
tant que celle-ci ne reste qu'un projet essentiellement économique.
S'agissant plus particulièrement du Royaume-Uni, si on met de côté les incertitudes
du présent, il apparaît que la politique britannique en faveur d'une
libéralisation des échanges sans dirigisme, inspirée par le parti conservateur,
n'a pas varié substantiellement depuis l'après-guerre, la parenthèse au sein
des Communautés ayant été une modalité, désormais abandonnée, pour en
poursuivre les objectifs. Le projet conservateur de sortie de l'Union européenne
est conçu comme la recherche d'une solution plus libre-échangiste
que l'actuelle, et non comme le virage interventionniste, et encore moins
protectionniste, que défendent d'autres partisans de la sortie de l'Union. Et
en effet, c'est bien une zone de libre-échange proche de la logique de
l'AELE (quoiqu'avec un régime beaucoup plus complexe) qui a été mise en
place par l'Accord de commerceet decoopération entrel'Union européenne
et Euratom d'une part, et le Royaume-Uni d'autre part, conclu le 24 décembre
2020, et entré en vigueur le 1er
mai 2021 (le 1er
janvier à titre provisoire). Sans
surprise, un Accord de libre-échange a également été conclu le 8juillet 2021
par le Royaume-Uni avec la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein, après l'Accord
commercial conclu avec la Suisse dès le 11 février 2019. L'Union européenne
peut certes se démarquer des souhaits libéraux des conservateurs britanniques,
mais pour quel projet ? Si l'Union veut plus qu'unezonedelibreéchange,
ce « plus » est-il limité à la négociation extérieure commune au titre
de l'union douanière ? Ou, doit-il englober des actions « positives » (des « politiques
» dans la conception européenne ; des « services publics » dans la tradition
française) en plus des réglementations « négatives » du libre-échange
(suppression des obstacles au commerce) et de la concurrence (interdiction
des aides d'État) ?
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