Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 76 - La responsabilité juridique à l'épreuve de la gestion - 120

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LA RESPONSABILITÉ JURIDIQUE À L'ÉPREUVE DE LA GESTION
de fait à un ''vrai'' comptable comporte nécessairement des limites logiques et
pratiques »103.
B. LES TITULAIRES DE L'ACTION EN DÉCLARATION DE GESTION DE FAIT
231. Avant 2008, les chambres régionales des comptes pouvaient être saisies en
vue de constater une gestion de fait, soit à la suite d'un recours du ministère public104,
soit de leur propre initiative à l'occasion de divers contrôles non juridictionnels et
facultatifs, tel l'examen de gestion105, la Cour des comptes statuant en second ressort.
La loi nº 2008-1091 du 28 octobre 2008 relative à la Cour des comptes et aux chambres
régionales des comptes a supprimé cette faculté d'auto-saisine car elle contrevenait
au devoir d'impartialité du juge. Depuis cette réforme, le réquisitoire du Ministère
public ouvre l'ensemble de la procédure. Il a l'exclusivité des poursuites.
232. Souvent les cas de gestion de fait sont découverts dans les rapports à fin
d'examen des comptes et de la gestion réalisés par les juridictions financières. Désormais,
ceux-là sont communiqués au procureur général près la Cour des comptes qui
seul peut juger de l'opportunité de confier à un magistrat financier le soin de rédiger
un réquisitoire aux fins de déclaration de gestion de fait, qui devra instruire à charge
ou à décharge106. Si une gestion de fait est déclarée, une seconde phase d'instruction
commence en vue à la fois de juger le compte et de déterminer si des amendes doivent
être infligées aux comptables de fait ou à certains d'entre eux107.
233. C'est notamment une jurisprudence contestable de la Cour des comptes qui
avait impulsé cette réforme. Il s'agissait de se conformer aux exigences communautaires
de droit au procès équitable découlant de l'article 6§ 1 de la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l'Homme108.
234. Dans le cadre d'un contrôle non juridictionnel de plusieurs services de
l'administration militaire, la Cour des comptes avait découvert un système de caisse
noire : avec la complicité d'un fournisseur, la société Labor-Métal, certains services
du commissariat de l'armée de terre passaient des marchés fictifs de fournitures, qui
donnaient lieu à de fausses certifications de service fait109. Suite à ces constatations, la
Cour des comptes a engagé une procédure de gestion de fait à l'encontre des personnes
impliquées, aboutissant à un arrêt de déclaration provisoire de gestion de fait
(C. comptes, 20 mars 1995, réq. nº 12.575). Dans son rapport annuel publié en octobre
1996, la Cour des comptes a relaté en détail les faits, allant jusqu'à procéder à une
véritable qualification juridique de ces faits, au point que cette qualification équivalait
à une déclaration de gestion de fait110.D'ailleurs, il n'est pas étonnant que la Cour des
comptes ait finalement, dans un arrêt définitif, confirmé la gestion de fait (C. comptes,
103. Ibid.
104. Article R. 212-19 du CJF.
105. Article R. 231-15 du CJF.
106. DESCHEEMAEKER C., Changer les procédures juridictionnelles de la Cour : une réforme
attendue et de grande ampleur, Revue Gestion et Finances publiques, nº 10, 2009, p. 703.
107. Ibid.
108. DESCHEEMAEKER C., Changer les procédures juridictionnelles de la Cour : une réforme
attendue et de grande ampleur, op. cit., p. 703.
109. Conclusion du commissaire du Gouvernement Seban sous CE, Ass., 23 février 2000, Société
Labor Métal, req. nº 195715, Rec., p. 82.
110. Ibid.

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