Mémentos - Droit constitutionnel et Institutions politiques - 26e - 178

178
MÉMENTOS - DROIT CONSTITUTIONNEL ET INSTITUTIONS POLITIQUES
7) Le pouvoir de légiférer par ordonnances (Const., art. 38)
Les ordonnances de l'article 38 correspondent aux décrets-lois des Républiques précédentes.
Ce sont donc des textes par lesquels le gouvernement peut modifier les lois.
Cela se fait en trois temps.
a) Le vote d'une loi d'habilitation
Cette loi correspond aux lois de pleins pouvoirs des Républiques précédentes. Elle ne
peut être prise que sur l'initiative du gouvernement. Le Parlement ne peut pas décider
spontanément de déléguer son pouvoir à l'exécutif. C'est une loi ordinaire. Donc, elle
ne permet au gouvernement que de modifier des lois ordinaires.
Il ne pourrait pas modifier une loi organique ni réviser la Constitution par ordonnance.
De plus, la loi d'habilitation peut être soumise au Conseil constitutionnel. C'est là une
garantie importante car le Conseil s'est employé à interpréter les lois d'habilitation de
manière à limiter la liberté du gouvernement. Par exemple : dans une décision de 1986,
il a estimé que la loi ne pouvait habiliter le gouvernement à découper des circonscriptions
électorales sans tenir compte d'un certain équilibre démographique.
La loi d'habilitation doit porter sur des matières délimitées. Elle doit permettre l'exécution
du programme du gouvernement. Lorsqu'il demande au Parlement l'habilitation
de légiférer par ordonnance, le gouvernement doit donc indiquer avec précision la finalité
des mesures qu'il se propose de prendre. Le Conseil constitutionnel l'a affirmé
expressément dans une décision de 1977. Les excès qui ont pu être commis avant cette
date ne sont donc plus possibles.
La loi d'habilitation doit préciser le délai durant lequel le gouvernement peut légiférer.
Cette durée doit être limitée. En pratique, cela va d'un mois à trois ans et demi.
Depuis la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003, le vote d'une loi d'habilitation
n'est plus nécessaire pour permettre au gouvernement d'étendre par ordonnance les
lois de métropole aux collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. L'article 74-1
de la Constitution prévoit une habilitation permanente sur ce point.
Entre 1960 et 2013, 552 ordonnances ont été utilisées pour légiférer.
Depuis le 14 mai 2017, le recours aux ordonnances de l'article 38 de la Constitution est
en hausse, en comparaison avec la pratique des deux quinquennats précédents.
À la date du 31 mars 2022, le Parlement a accordé 369 habilitations à légiférer par
ordonnances, soit une hausse de 105% par rapport au même stade du quinquennat
2007-2012 (180 habilitations au 31 mars 2012) et de 9% par rapport à la même
période du quinquennat 2012-2017 (338 habilitations au 31 mars 2017).
b) L'édiction des ordonnances
Les ordonnances ne peuvent être édictées qu'après avis du Conseil d'État, même si le
gouvernement n'est pas lié par cet avis. Elles doivent être délibérées en conseil des
ministres, donc, elles demandent à être signées par le président de la République. Si
celui-ci consent à apposer sa signature, elles entrent en vigueur dès leur publication.
Pendant le délai d'habilitation, le gouvernement a toute liberté pour les édicter ou les
modifier. En revanche, le Parlement n'a pas le droit de légiférer sur les matières qu'il a
déléguées tant que le délai d'habilitation n'a pas expiré. C'est la grande différence
avec le régime des décrets-lois. Une fois le délai d'habilitation expiré, le gouvernement

Mémentos - Droit constitutionnel et Institutions politiques - 26e

Table des matières de la publication Mémentos - Droit constitutionnel et Institutions politiques - 26e