Annales corrigées et commentées - Droit des obligations - L2 - 7e - 154

se rendre en ce lieu, et alors qu'il n'est pas soutenu qu'il lui
avait été interdit d'y aller. L'arrêt ajoute qu'à supposer que
l'enfant ait procédé lui-même au chargement de l'arme,
cela implique nécessairement la présence d'une munition
à proximité.
6. De ses constatations et énonciations, faisant ressortir que
l'enfant, âgé de onze ans, ne pouvait être considéré comme
ayant acquis les pouvoirs de direction et de contrôle sur
l'arme dont il avait fait usage, la cour d'appel a pu déduire
que la preuve du transfert de garde invoqué par M. et
Mme
U... n'était pas rapportée.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
OBSERVATIONS DU CORRECTEUR (Th. Goujon-Bethan)
L'arrêt proposé porte sur un thème classique de la responsabilité du fait des
choses : la notion de garde.
Le commentaire offre la possibilité de mobiliser utilement les connaissances
générales (garde juridique et garde matérielle, attributs de la garde, place
du discernement dans la garde, perte involontaire de la garde et transfert
volontaire, rapports de la responsabilité du fait des choses et de la responsabilité
pour faute). Il suppose néanmoins de bien cerner la spécifi cité du
transfert de garde par rapport à la détermination initiale du gardien et parfaitement
maîtriser le cours.
Le plan suit le raisonnement de la Cour de cassation et ne présente pas de
diffi culté.
L'accroche peut se limiter à mettre
en avant l'apport essentiel
de l'arrêt.
S'il est possible de déclarer responsable du fait d'une chose un enfant dénué de
discernement, la preuve d'un transfert de garde à un enfant n'est cependant pas
aisée à rapporter. C'est ce qu'illustre l'arrêt publié au bulletin rendu par la deuxième
chambre civile de la Cour de cassation le 26 novembre 2020.
En l'espèce, un enfant de 11 ans rend visite, avec sa mère, à des voisins. Échappant
à la vigilance des adultes, il se rend au sous-sol desdits voisins. Là, il trouve un pistolet
« gomme-cogne ». Ayant procédé au chargement de l'arme avec une munition
placée à proximité, il se blesse grièvement à l'œil gauche en manipulant le pistolet.
La responsabilité des propriétaires de l'arme est recherchée par le représentant légal
du mineur qui assigne les voisins et leurs assureurs. La cour d'appel les déclare entièrement
responsables du dommage subi par l'enfant.
L'arrêt porte sur les conditions
de transfert de garde dans un
contexte bien particulier qui
doit fi gurer dans le problème de
droit. Ce n'est pas parce qu'un
problème de droit doit être général
qu'il doit exclure les éléments
de contexte lorsque cela est
nécessaire.
Les voisins et l'assureur se pourvoient alors en cassation. Ils reprochent à la cour
d'appel de ne pas avoir retenu l'existence d'un transfert de garde de l'arme au
mineur qui se l'est pourtant appropriée, ainsi que les munitions, à l'insu du propriétaire,
ce dont il résultait que l'enfant avait acquis l'usage, la direction et le contrôle
du pistolet. Selon le pourvoi, la cour d'appel aurait ainsi violé l'article 1384 du Code
civil dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce.
La Cour de cassation devait donc répondre à la question suivante : lorsqu'un enfant
âgé de onze ans appréhende matériellement une arme entreposée dans une maison
à l'insu de son propriétaire et se blesse, le propriétaire de l'arme peut-il invoquer
un transfert de garde pour échapper à la mise en œuvre de sa responsabilité du fait
des choses ?
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