Annales corrigées et commentées - Droit des obligations - L2 - 7e - 97

quelconque négociation et qu'elles ont été déterminées à l'avance par la société
FAUX-TEUIL qui les a fait signer à la société ÉNEBI.
La qualification de contrat d'adhésion peut donc être retenue puisque le contrat
comprend des stipulations non négociables et déterminées à l'avance.
La seconde condition porte sur le caractère non négociable et déterminé à
l'avance par l'une des parties de la clause. Dans la mesure où la clause invoquée
figure dans les conditions générales qui sont non négociables et déterminées à
l'avance par la société FAUX-TEUIL, vendeur, cette condition est remplie.
La troisième condition suppose de déterminer si la clause litigieuse crée un déséquilibre
significatif entre les droits et obligations des parties ne portant ni sur l'objet
principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.
Plusieurs éléments permettent d'invoquer un déséquilibre significatif. Celui-ci résulte
en l'espèce de ce que la clause litigieuse confère à la société FAUX-TEUIL un pouvoir
unilatéral de modifier l'objet de sa prestation sans l'accord de la société ÉNEBI.
Cette clause instituant un pouvoir exorbitant en faveur d'un contractant n'encadre
pas cette prérogative. Elle ne trouve dans le contrat aucune contrepartie dans la
mesure où le prix convenu correspond au prix du marché.
Toutefois se pose la question de savoir si l'appréciation de ce déséquilibre ne porte
pas ici sur l'objet principal du contrat. D'un côté, en effet, on peut soutenir que la
clause permet à la société FAUX-TEUIL de modifier l'objet de sa prestation, laquelle
forme l'essence et donc l'objet principal du contrat de vente. De l'autre côté, on
peut considérer que la clause concernée ne participe pas de la définition de l'objet
du contrat puisque précisément c'est une clause qui permet au contractant
de modifier cet objet au cours de la relation contractuelle. Dès lors, le déséquilibre
significatif ne porte pas ici sur la définition de l'objet du contrat mais sur la possibilité
de modifier cet objet.
En cet état, si cette deuxième interprétation est retenue, il apparaît que la société
ÉNEBI dispose de chances sérieuses de voir déclarer non écrite la clause sur le
fondement de l'article 1171 du Code civil.
Toutefois, si par impossible la clause n'était pas réputée non écrite, il serait envisageable
d'en neutraliser la mise en œuvre par la société FAUX-TEUIL.
B) La neutralisation de la mise en œuvre de la clause
Il résulte de l'article 1104 du Code civil que les contrats doivent être exécutés de
bonne foi. La violation du principe de bonne foi peut faire l'objet d'une sanction
autonome. Dans un arrêt Les Maréchaux rendu le 10 juillet 2007, la chambre commerciale
de la Cour de cassation a considéré que « la règle selon laquelle les
conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner
l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle » tout en précisant que cette règle
ne l'autorise pas, en revanche, à « porter atteinte à la substance même des droits
et obligations légalement convenus entre les parties » (n° 06-14768). Ces principes
ont été réaffirmés dans un arrêt rendu le 26 mars 2013 par la chambre commerciale
(n° 12-14870) et ne paraissent pas remis en cause par la réforme du droit des
obligations.
En l'espèce, il ne paraît pas douteux que la clause invoquée par la société FAUXTEUIL
institue en sa faveur une prérogative contractuelle. Tel est le cas de la clause
qui autorise un contractant à modifier l'objet de sa prestation unilatéralement.
En présence d'un point difficile,
faites état des différentes positions
envisageables.
En effet, selon la définition du
Professeur Philippe Stoffel-Munck,
les prérogatives contractuelles sont
des clauses qui « ont en commun
d'investir une partie de la possibilité
de modifier unilatéralement
la situation du cocontractant au
regard de ce qu'il pouvait attendre
d'une exécution paisible de
la convention » (D. 2007, p. 2839).
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