CRFPA - Procédure pénale - CRFPA - Examen national Session 2023 - 6e - 75

Exercice corrigé
CAS PRATIQUE
Sujet
Mme Delfosse fait l'objet d'une mise en accusation devant la cour d'assises du Nord pour
des faits qualifiés de crime d'empoisonnement. L'affaire est très médiatisée, Mme Delfosse
invoquant la légitime défense pour justifier l'empoisonnement de son conjoint dans un
contexte de violences conjugales. De nombreux médias sont présents, prenant des images
de Mme Delfosse lors de son arrivée dans la salle d'audience et avant l'ouverture des débats.
Finalement reconnue coupable du crime sans que la légitime défense ne soit retenue (l'agression
n'était plus actuelle ou imminente au moment de la commission du crime), Mme Delfosse
est condamnée à la peine maximale de trente ans de réclusion criminelle. Elle se demande
si le choix de cette peine sera motivé. Elle craint en effet que l'un des assesseurs de la
cour d'assises, qui avait déjà, en tant que juge des libertés et de la détention, décidé de
son placement en détention provisoire, ait orienté les jurés dans le sens de la sévérité. Elle
se demande aussi rétrospectivement si la captation de son image pour diffusion dans les
médias dès le début du procès ainsi que la présence constante de ces derniers à l'audience
ne lui ont pas été préjudiciables. Qu'en pensez- vous ?
Corrigé
Il convient tout d'abord de préciser que depuis la loi du 23 mars 2019, la peine prononcée par
la cour d'assises est soumise à l'exigence de motivation. L'article 365-1 du Code de procédure
pénale, modifié par cette loi, prévoit que la motivation ne consiste pas seulement dans
l'énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé,
ont convaincu la cour d'assises de la culpabilité, mais aussi dans l'énoncé des principaux
éléments ayant convaincu la cour d'assises dans le choix de la peine, au vu des éléments
exposés au cours de la délibération. Cette exigence de motivation de la peine criminelle
découle du principe d'individualisation des peines issu de l'article 8 de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen de 1789 (Cons. const., 2 mars 2018, n° 2017-694 QPC).
Ensuite, l'article 306 du Code de procédure pénale pose le principe de la publicité des débats.
La garantie de publicité du procès d'assises implique l'admission du public à l'audience ainsi
que la reproduction des débats dans les médias. Il n'est donc pas contestable en l'espèce
que les médias aient pu assister à l'audience, ni même qu'ils aient restitué le déroulement
de l'audience. En outre, et depuis la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution
judiciaire, l'article 38 quater de la loi du 29 juillet 1881 autorise l'enregistrement
sonore ou audiovisuel d'une audience, pour un motif d'intérêt public d'ordre pédagogique,
informatif, culturel ou scientifique, en vue de sa diffusion. Les modalités de l'enregistrement
ne doivent pas porter atteinte au bon déroulement de la procédure et des débats, ni au libre
exercice de leurs droits par les parties et les personnes enregistrées, dont la confidentialité
des échanges entre l'avocat et son client. De plus, la diffusion, intégrale ou partielle, de
l'enregistrement n'est possible qu'après que l'affaire a été définitivement jugée. Surtout,
un tel enregistrement nécessite une demande d'autorisation au ministre de la Justice. La
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